C’était en août 2017, au Motocultor Festival, la rédaction d’Heretik Magazine avait enfin pu assister à un concert de Sangdragon ! Néanmoins, leurs shows, en dépit de la qualité indéniable dont les musiciens font preuve, sont encore trop rares… Mais tout cela semble s’arranger au fil des mois, la preuve avec ces dates qui ne cessent de tomber un peu partout. Une orpheline, notre région. Pourquoi ? On ne sait pas. Voilà la raison pour laquelle la rédaction a décidé de contacter Will Hien, le bassiste, ex-Nordiste, pour à la fois prendre de ses nouvelles et aborder quelques sujets sensibles.

Propos de Will Hien recueillis par Axl Meu le vendredi 3 novembre. 


Salut Will ! Vous revenez d’un week-end assez chargé ! Deux dates sur deux jours, toi qui nous expliquais il y a encore quelques mois que c’était difficile de trouver des dates, te voilà enfin rassuré, non ? 

Salut ! Alors, la réponse sera oui et non. Oui, parce que 2017 aura été une année plutôt sympathique pour Sangdragon, en termes de concerts, avec en point d’orgue le Motocultor… Et non, car il est toujours aussi compliqué de faire comprendre à certaines orgas de concerts qu’elles doivent arrêter de toujours prendre les mêmes groupes vus des dizaines de fois. Certains organisateurs ne répondent même pas aux mails tant que ça ne vient pas des agences de booking habituelles… Certains festivals préfèrent donc payer des prix exorbitants plutôt que de passer en direct par les groupes, c’est dommage. Mais dans l’ensemble, la situation actuelle de Sangdragon est positive, car on est de plus en plus demandés. Par moments, je n’ai pas besoin de contacter au préalable les organisateurs… !

J’ai lu quelques mauvais retours concernant le Conquerant Metal Fest. C’est étrange ! Il y avait des problèmes de son façade ? J’imagine que ça n’a pas dû faciliter la tâche… 

Apparemment oui… Mais nous, depuis la scène, nous ne nous sommes rendus compte de rien ! Le son était bon dans les retours. Cependant, ça ne m’étonne guère. En fait, un backline commun était prévu, au moment où nous sommes arrivés sur scène, mais la batterie sur laquelle avaient été effectué les balances des deux premiers groupes, a été remplacée par une autre de moins bonne qualité, sans qu’on ne sache pourquoi. Bref, ce qui aurait donc dû être un line-check de 15 minutes orienté uniquement sur la guitare, la basse et les micros chant s’est transformé en une balance d’une demi-heure axée sur la batterie, avec un trigg grosse caisse pas bien réglé du tout et qui s’est mis à saturer dès le premier titre. Bref, notre ingé-son a fait ce qu’il a pu pour sauver les meubles, mais notre son a eu à en souffrir, ce qui m’a passablement agacé. Ceci a eu aussi pour effet de nous empêcher de bien rentrer dans le show tout de suite. Mais heureusement, d’autres nous ont dit que ça dépendait aussi de là où on se trouvait dans la salle. Nos potes Crass (Crusher) et Stéphane (Loudblast), nous ont même dit avoir été impressionnés par la puissance que nous dégagions sur scène. Après ça, j’ai retrouvé le sourire…

Dommage pour le son… Car cette affiche était géniale. Mercyless, Agressor, Witches, Loudblast et vous…
… Sans oublier Crusher, qui a tout dévasté ! Oui, une affiche de rêve rassemblant tout le gratin de l’extrême Old School français. Je n’ai donc pas très bien compris la raison pour laquelle il y a eu si peu de monde… Tout au plus 350 personnes. Où étaient les Normands ? Les Caennais ? Sachant qu’en plus, ce concert avait un volet caritatif et que l’organisation a été parfaite de bout en bout avec des bénévoles aux petits soins pour les groupes et le public. Résultat, après avoir discuté avec le couple qui a organisé cette sauterie, j’ai appris qu’il n’y aura pas de Conquerant Metal Fest 3… Super… Quand tu vois que même une affiche de folie comme celle-là n’attire pas plus de monde, c’est à désespérer parfois. Mais de toute façon… Qu’il y ait 40 personnes ou 4.000, ça ne change rien pour nous, on se donne toujours à fond ! Et en fin de compte, nous sommes très fiers d’avoir pu partager ça avec les potes des autres groupes, que nous côtoyons parfois depuis presque trente ans.

Le style de Sangdragon détonne pourtant par rapport à ces groupes. Avec Sangdragon, on est loin du Thrash Old School… Vous, c’est plus Black/Folk. Comment les fans ont-il réagi ?

Ils ont réagi comme la veille au Hell’Oween Fest, à Saintes, où ça s’est également bien passé et comme ça se passe en général ailleurs. Il se passe beaucoup de choses avec nous sur scène entre les parties typiquement Metal, le bouzouki sur certains titres, les chœurs véritablement chantés et les arrangements au clavier. Du coup, ceux qui ne nous connaissent pas forcément se mettent en général un peu en retrait et écoutent attentivement le show, pour bien appréhender la variété de nos ambiances et ceux qui sont plus coutumiers de nos disques mettent l’ambiance dans le pit. Dans tous les cas, nous parvenons toujours à convertir de nouveaux adeptes. Un signe qui ne trompe pas, c’est que nous réalisons toujours pas mal de ventes au merch’ après les concerts. Je n’aurais qu’une chose à rajouter ! Aucune affiche ne nous fait peur car nous sommes sûrs de notre fait : Sangdragon sur scène est une véritable machine de guerre !

Revenons à l’historique du groupe. Sangdragon est la suite d’un projet que Vincent Urbain a mis en place dans les années 90. Une trilogie mystique, dont le dernier album en date est Requiem For Apocalypse (2015). C’est le troisième album, donc… C’est la fin ? On ne peut plus rien attendre de vous par la suite ?
Je peux t’annoncer qu’il y aura bien un nouvel album et qu’il sortira bien sous le nom de Sangdragon. Les noms Daemonium et Akhenaton correspondent à une époque révolue, celle de l’avènement du Black Metal atmosphérique et symphonique, dont Vincent fut un des principaux artisans, et d’un état d’esprit qui n’est plus le sien aujourd’hui. Et surtout, maintenant, Sangdragon n’est plus le projet d’un seul homme, c’est un véritable groupe fondé sur l’amitié et la confiance. Et puis, nous n’avons pas fait tout ce chemin depuis quatre ans pour refaire parler du projet, pour encore changer de nom. Nous allons entamer les discussions avec les labels très bientôt.

On a appris dernièrement qu’Olivier avait décidé de quitter les rangs. Pourquoi ? Il n’a plus le temps de se consacrer à l’aventure de Sangdragon ?
C’est plus compliqué que ça, et je n’ai même pas envie de m’étendre sur le sujet. Ce qui est dit dans le vestiaire doit rester dans le vestiaire. Ces problèmes m’ont et nous ont coûté beaucoup d’énergie et de temps à rechercher en urgence un remplaçant pour nos deux concerts de fin octobre, et celui de mi-septembre en Suisse, car il était hors de question pour nous de ne pas tenir nos engagements. Heureusement, nos amis mâconnais, Régis Cognard qui a enregistré les parties de l’album et Paul Sordet, ont pu nous dépanner. Et de fort belle manière, puisqu’ils n’ont eu à chaque fois que très peu de temps pour apprendre le set complet, et juste trois répètes, en tout et pour tout, pour tout mettre en place avec nous. Bravo et encore une fois, grand merci à eux ! Pour la suite, nous continuons les auditions, nous ne savons pas encore qui sera le prochain batteur officiel du groupe. Sachez juste que quelques « tueurs » se sont proposés, et que nous allons donc prendre le temps de la réflexion afin de ne pas recommencer tout ce cirque dans un an !

J’imagine que l’album est en cours de conception. En ce qui concerne le style, vous distillerez toujours un Black Symphonique ?
Sept titres sont déjà prêts ou quasiment prêts, mais nous allons prendre tout notre temps pour peaufiner les compositions et faire les arrangements. Trois ans ont été nécessaires pour que nous soyons satisfaits à 100% de Requiem For Apocalypse. En ce qui concerne le style, il sera effectivement le même. Ça sera un mélange de Death et de Black, saupoudré d’ambiances et de symphonies. Il y a trois ou quatre titres qui vont démonter des nuques ! Nous en jouons déjà un depuis cette année en concert, c’est « Curse Of Desert ». C’est un morceau fait de puissance, de blasts et d’ambiances quelque peu orientales.

Comment parvenez-vous à équilibrer les guitares et les arrangements plus « symphoniques » ?

Les arrangements sont faits par Vincent et Edouard, notre claviériste. Vincent part toujours d’un riff à la guitare sèche ou au bouzouki, ou d’une ligne de basse voire d’une idée au clavier et tout s’articule ensuite autour, grâce au génie d’Edouard. On trouve un équilibre en fonction des émotions ou de la puissance que l’on veut véhiculer. Matt et moi amenons ensuite notre grain de sel. Il est toutefois à noter que Matt a aussi composé certaines choses cette fois, et c’est bien Black Metal !

Est-ce que vous allez inclure la reprise de Game Of Thrones dans ce nouvel album ? 

Non ! Tout simplement car il n’a jamais été question dans notre esprit que cette reprise apparaisse sur un support physique. Nous avons juste fait ça pour nous amuser. À titre personnel, je suis fan de cette série, mais ce n’était pas le cas de tous. Vincent a eu la bonne idée d’écrire des chœurs originaux, ce qui a apporté un vrai plus à la composition, et nous avons mis la patte Sangdragon sur la deuxième partie en ajoutant des parties plus  « Metal ». Pour la promouvoir, nous avons tourné un petit clip dans une taverne de Mâcon en trois heures un dimanche matin. L’idée était de tourner un clip, sans prétention, avec notre ami Mehdi Khadouj aux commandes, mais où nous n’apparaissions pas en costume dans une forêt enneigée ! Cette vidéo a fait le buzz, avec plus de 182.000 vues sur notre page Facebook en quelques semaines ! Le pire, c’est que quand nous sommes arrivés à cette taverne la gueule encore enfarinée de la veille, il faisait super froid et il neigeait à gros flocons, ce qui est parfait pour une série qui annonce le début de l’hiver. Maintenant, comme tout le monde nous la réclame en live, nous la jouons.

Sangdragon, en live, c’est épique, Vincent joue les chevaliers… Mais vous n’avez pas peur d’être trop « kitsch » par moments ?

C’est une question que nous avons souvent abordé entre nous mais je vais te dire un truc… Vincent se moque totalement de l’avis des gens sur ce coup ! Sangdragon / Akhenaton / Daemonium, c’est Vincent et personne d’autre, et il est juste qu’il soit mis en avant. Et comme il le dit souvent, quand les gens lui demandent pourquoi il se vêtit de la sorte, il répond qu’il est en civil (rires)… Vincent vit et pense Sangdragon, il aime beaucoup les jeux de rôle, les épées, Warhammers, les tatouages, les ambiances celtiques et médiévales. Il ne pense qu’à ça 24h/24. Il fait partie d’une troupe médiévale et son magasin à Mâcon, l‘Œil du Dragon, lui permet de vivre sa passion totalement depuis plus de quinze ans. C’est un tout. Evidemment, certains vont trouver ça kitsch : je les invite donc à venir lui en faire part en direct après les concerts… (rires)

Ce week-end, vous étiez même tous grimés de maquillage. Une première pour vous, non ?

Oui, pas tout-à-fait. Il faut savoir que sur certains concerts, Matt et moi nous nous aspergions déjà de sang (de dragon, évidemment) mais là, comme nous jouions au Hell’Oween Fest, nous avons poussé le vice. L’idée est de donner une identité visuelle encore plus forte à nos concerts, un côté un peu plus extrême dans le look, et les gens ont aimé. Il y a fort à parier que nous allons continuer sur cette voie à l’avenir…

Will, tu es originaire du Nord, et pourtant, nous ne t’avons jamais vu sur Lille, du moins pas avec Sangdragon. Et pourtant on sait qu’il y a des organismes qui seraient prêts à vous accueillir, de même que le public qui va avec. Tu prêches là un convaincu. Alors, c’est pour quand ?

Mais il est vrai qu’avec Sangdragon, ça n’a pas encore été possible. Ça a failli se faire fin 2016 à Douai, avec l’Asso Spits, mais la salle qui devait nous accueillir a finalement été déclarée « impropre à la consommation ». Pour moi qui suis du Nord, avec toute ma famille et mes potes sur place, ce fut un déchirement. Quant aux autres assos, je ne sais plus ce que je dois faire pour les convaincre ! Je suis persuadé que notre style théâtral serait parfait pour le In Theatrum Denonium. J’avais également d’excellentes touches avec le Gohelle Fest, c’était bien parti mais le festival est malheureusement tombé. Heureusement, ils refont des dates à Oignies, j’espère donc qu’on pourra rentrer sur une de leurs prochaines affiches en 2018. Enfin, et il va certainement l’apprendre au travers de cette interview, ma prochaine cible sera le Tyrant Fest 2018, car je suis sûr que Sangdragon peut mettre la pile à tout le monde sur ce genre de dates. Que Sangdragon ne soit pas encore venu jouer dans le Nord est un non-sens car nous avons vendu des palettes d’albums et de t-shirts chez vous ! Oui, honte à vous, chers organisateurs (rires).

Tu sais, Heretik Magazine est un média qui promeut la scène locale des Hauts-de-France. Tu as quand même le temps de suivre notre actualité ? Quels souvenirs entretiens-tu avec notre région ?

Oui ! Je vous suis, et merci les réseaux sociaux pour ça. Déjà, je vous tire mon chapeau. La scène Metal a besoin d’activistes, encore plus la scène extrême. Je sais de quoi je parle… Quand j’ai co-créé Metal Obs’ Magazine en 2005 avec mes collègues de Noiseweb, notre idée était la même, et finalement, cette folle aventure s’est transformée en magazine national. Nous nous sommes usés la santé mentale là-dessus, mais nous pouvons affirmer haut et fort : nous l’avons fait ! Vous pouvez donc être aussi très fiers du travail que vous accomplissez, et ce depuis le début de l’aventure Sounds Like Hell… En ce qui concerne mon attachement au Nord… Comment te dire ? Voilà 10 ans que j’ai rejoint la Bourgogne, mais je suis resté en contact avec plein d’amis via les réseaux sociaux… Quand on se croise sur certains concerts, c’est comme si nous nous étions quittés deux semaines auparavant. Ça n’a pas été facile de quitter le Nord, donc ça me touche de savoir que l’on ne m’a pas oublié. Ma famille se trouve toujours du côté de Carvin, Lille ou Denain, donc je reste viscéralement attaché à cette région. Ceux qui me connaissent bien savent que je n’ai pas du tout perdu mon accent Ch’ti, que je parle toujours autant patois avec les potes (rires). Pour moi, c’est un honneur d’être du Nord, de venir des corons. Je le revendique haut et fort, même depuis ma lointaine Bourgogne, car notre région a été le pilier de la refondation de la France après guerre, et nos grands-pères, qui se sont usés la santé dans les mines et les usines métallurgiques, méritent un respect absolu. Il est d’ailleurs amusant de voir que le Tyrant Fest ou le Gohelle Fest se déroulent aujourd’hui sur la mine où a travaillé et où a été gravement blessé mon grand-père lors d’un éboulement dans les années 60…

Quelles sont vos prochaines dates ? 

Nous allons terminer l’année avec deux dates semi-acoustiques, dans notre région, les 11 et 25 novembre. Cinq dates sont déjà calées pour 2018, mais comme elles ne sont pas encore annoncées, je ne peux pas en parler. Tout ce que je peux te dire, c’est que Sangdragon va enfin mettre le pied en Allemagne au printemps et que nous n’allons jouer que sur des festivals, car c’est là où toute notre puissance peut s’exprimer. Nous allons aussi ouvrir pour une très grosse tête d’affiche sur un nouveau festival qui est en train de se monter en Bourgogne dans une grosse salle. Et il se pourrait fort bien que nous essayions de monter une petite tournée à l’automne prochain, histoire d’aller jouer dans des coins où nous ne sommes jamais allés…

Un dernier mot ?

Déjà, un grand merci à toi pour cette interview et pour l’intérêt que tu montres pour Sangdragon. Merci également à tous les Ch’tis qui nous suivent depuis le retour de Sangdragon en 2014 et, bien sûr, un salut amical à tous les potes. Ils se reconnaîtront ! Petite remarque ! Aller remplir les Zénith, c’est sympa, mais n’oubliez pas qu’il n’y a pas de véritables créations sans scène locale. Comme tout le monde, Metallica et Gojira ont un jour commencé dans une cave et ont écumé les petites salles avant d’avoir la chance d’exploser. Donc, soutenez vos assos locales en priorité, c’est très important ! J’espère donc que 2018 sera la bonne pour un show « dins ch’Nord » !


Sangdragon, c’est : 

Vincent Urbain : Chant, Multi-instrumentiste

Will Hien : Basse, Backing vocals

Matt Asselberghs : Guitares 

Edouard Verneret : Clavier

Alison Foret : Choeurs

Alice Mouchetant :  Choeurs 

Cynthia Marciniak : Choeurs

Joel Rebouta : Choeurs

Thibault Voituret : Choeurs

Discographie : 

Daemonium :

Dark Opera Of The Ancient War Spirit (1994)

Akhenaton :

Divine Symphonies (1995)

Sangdragon :

Requiem For Apocalypse (2015)

A propos de l'auteur

Rédacteur en chef d'Heretik Magazine

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