Parmi les groupes que tout le monde attendait au Tyrant Fest figurait Regarde Les Hommes Tomber. En effet, si Antoine ne semble pas être conscient de l’évolution permanente de son groupe, la rédaction, elle, se rend compte de sa montée en puissance. Pour preuve, exit La Lune Des Pirates, et direction la scène du Métaphone de Oignies, où ils n’ont pas eu trop de mal à fidéliser de nouveaux fans…

Propos de A.M. recueillis par Axl Meu le 11 novembre au Métaphone.

Crédit photos : Slaytanic (Cédric Cambien)


On vous revoit enfin dans les Hauts-de-France ! La dernière fois que vous vous y êtes produits, c’était dans le cadre du In Theatrum Denonium. J’imagine que vous en gardez un excellent souvenir ! Il y avait également Déluge, Céleste et Melechesh à l’affiche. Tu peux revenir sur cette date ? 

On avait trouvé ça très audacieux de nous inviter à nous produire dans le cadre d’un festival atypique. Quand tu te produis régulièrement, tu as l’habitude de jouer dans des salles qui se ressemblent un peu toutes. Souvent, on est agréablement surpris par les moyens qui ont été déployés pour nous accueillir, comme ce soir par exemple. Mais, là, ce qui est sympathique avec le In Theatrum Denonium, c’est que les organisateurs ont dépassé tout cela, en proposant un cadre totalement différent. Ça collait parfaitement avec notre musique et notre univers. On a donc abordé ce concert différemment. Après, c’est également un plaisir personnel, mais je pense que ça s’est également ressenti dans la salle. Tu sais, c’est quand même très particulier de ne se produire que devant des fans assis dans une salle marquée par l’histoire et ornée par de belles illustrations. C’était magnifique… J’ai trouvé ça osé de la part des organisateurs de vouloir changer du tout au tout. Avant, ils organisaient les Metallurgicales, qui était un festival plutôt conventionnel. Là, on est désormais sur quelque chose de plus ciblé.

La côte de popularité de Regarde Les Hommes Tomber a explosé en quelques années. Est-ce que tu t’en rends compte ? 

En fait, j’ai eu du mal à faire la distinction entre les deux albums. Dès le début, on était déjà sur une pente ascendante. On a eu des bons retours, on a saisi de bonnes opportunités et tout cela s’est développé au fil des mois. Nous revenons d’une tournée européenne qui a duré trois semaines. Nous avons rencontré pas mal de succès, donc tout va très bien. Nous nous sommes également produits au Hellfest cette année…

… La Temple était archi-blindée. Vous vous y êtes produits en début d’après-midi, et pourtant, le public était au rendez-vous. 

On s’attendait à ce qu’il y ait du monde, mais pas autant…

… Même Arkhon Infaustus n’a pas rencontré le même succès ! 

C’est sûrement dû au fait qu’Arkhon Infaustus reprenait ses activités et que le public ne s’attendait pas de les revoir de sitôt. C’était leur première grosse date. Ce n’est pas évident de reprendre sur une aussi grande scène.

Parlons à présent de la tournée européenne que vous avez entreprise. C’était comment ? Si mes souvenirs sont bons, vous avez partagé l’affiche avec Der Weg Einer Freiheit pendant une vingtaine de journées.

On a fait 23 concerts sur 25 jours. On est partis un peu plus de trois semaines, c’est la première fois que nous tournions autant. C’était juste impensable avant.

On vous connaissait à l’etranger ? 

Aussi surprenant que cela puisse être, nous avions déjà des fans en Europe. Lors de notre concert à Berlin, j’ai rencontré un fan qui avait la broche qu’on avait vendu avec la box de notre dernier album, qui était en édition limitée. Il nous a expliqué que c’était lui qui avait fait découvrir notre musique à Nergal (Behemoth, NDLR). C’est surprenant…

On revient aux origines. Le fameux bouche à oreille…

Oui. Ceux qui ne nous connaissaient pas, allaient à notre rencontre juste après la fin des concerts. Et ils nous expliquaient qu’ils avaient bien aimé notre manière de jouer, mais qu’ils ne nous connaissaient pas avant. Nous nous sommes dits qu’il serait préférable à l’avenir de tourner plus souvent en Europe et de privilégier la promo de notre musique à l’étranger. Ça plaît, nous avons donné des concerts très intenses, mais le public ne nous connaissait pas.

Ce dernier concert dans le cadre du Tyrant Fest clôture donc l’ère « Exile ». Vous allez donc prendre une petite pause et surtout penser à son successeur. Vous avez déjà des idées pour la suite ? 

On s’est rendu compte qu’on avait du mal à composer des morceaux lorsque l’on était sur la route. Après la sortie de Regarde Les Hommes Tomber, nous avons fait une pause pour ensuite recommencer à écrire. Ça a fonctionné puisque nous avons pu composer Exile assez rapidement. Là, pour promouvoir Exile, on a fait bien plus de concerts, donc c’était impossible pour nous de composer. J’habite à Paris, les autres sont à Nantes. Le week-end, nous sommes sur la route. C’est très compliqué d’écrire. Ce soir, c’est le dernier concert de cette longue tournée de deux ans, on va se concentrer sur l’écriture. Je ne peux pas t’en dire plus, j’ai beaucoup d’idées, mais rien n’est précis.

Tu n’as toujours pas pensé au thème ? 

Si, bien sûr. Si tu veux, on travaille avec un ami à nous qui compose les paroles. On lui suggère des thématiques à aborder. Ce qui est intéressant chez nous, c’est que nous travaillons sur les visuels, pas forcément en accord avec la musique. Par exemple, nous avons trouvé le patronyme « Exile » après avoir eu les paroles et les visuels. Ça correspond parfaitement à l’artwork. Là, j’ai eu une idée pour la suite, mais il faut que je consulte les autres membres. La thématique a une importance sur les visuels, sur les atmosphères que l’on retranscrit. Tout ce que je peux te dire, c’est que l’on va commencer à s’éloigner de l’étiquette Post Black Metal, dans le sens où nous voulons élargir nos frontières. Tu sais, quand nous avons commencé, le terme Post Black Metal n’existait pas. Personnellement, je déteste les étiquettes et, maintenant qu’il y a beaucoup de groupes qui se revendiquent du « Post Black Metal », je décide de m’en éloigner. Je n’ai pas envie de ressembler à ces groupes.

Oui, j’imagine que vous allez élargir, ou peut-être affiner votre style afin de ne ressembler à aucun autre. Vous me parlez de Post Black, moi je parlerais plutôt de Black Sludge…

Honnêtement, le terme « Sludge » était un terme assez vendeur à l’époque. En vrai, les groupes de Sludge sont des groupes de Hardcore mélangés à la scène « New Orlean ». Ça ne ressemble pas du tout à ce que l’on fait. Si tu veux, nos passages rythmiques ont plus à voir avec Monotheist de Celtic Frost, qu’un truc de Sludge. C’est très compliqué de jouer avec les étiquettes. On avance, et on verra !

Votre musique est assez dépressive, mais surtout très mélancolique. Comment parviens-tu à transmettre ces émotions ?

Qui a réussi à poser un univers sombre, mélancolique, ça nous a indiqué le chemin à suivre, quand même moi qui n’avais pas composé, quand nous étions en répétition, nous ressentions quelque chose de particulier, et le riff que j’ai composé de continuer dans cette voie, comment composer ? c’est se soucier de soi-même, voir ce que toi tu vas ressentir

Quand vous enregistrez, ça se passe comment ? Parfois, ça se joue à rien ! 

Tu n’as pas tort. Sur le premier album, on a enregistré l’album au clic, on s’est rendu compte que ça tuait la dynamique de notre musique, et que ça tuait l’émotion qu’on voulait mettre – Regarde Les Hommes Tomber, musique à vivre -. Pour le deuxième album, j’ai fait les prises témoins de l’album, j’ai joué mes riffs. Je jouais les parties avec le batteur, comme en répétition on gardait l’osmose à l’instant T.

Le prochain album sera donc le deuxième avec Thomas au chant. Est-ce que toi aussi, tu as constaté une évolution dans son chant ? 

Thomas, quand il a intégré le groupe, n’avait fait que trois concerts avec nous. Thomas n’a pas forcément la même culture. Je l’ai bien embêté et poussé à donner le meilleur de lui-même sur la façon dont ça devait sonner, sur la manière dont il devait chanter. On savait très bien où nous voulions aller. Après, en concert, c’est une question d’interprétation. Il a tendance à avoir une voix moins aiguë, plus rauque, mais je trouve que ça marche très bien. Ce qui est sûr, c’est que sur le prochain album, on a va faire très attention à la voix. Il faut savoir que les Regarde Les Hommes Tomber était un groupe instrumental au début. On a composé les morceaux sans chanteur. Et on a ensuite trouvé un chanteur (Ulrich, NDLR).

C’est la guitare qui domine chez Regarde Les Hommes Tomber.

Oui, je dirais que c’est la guitare également. La voix vient vraiment tout à la fin. Cette fois-ci, on voudrait travailler plus la voix.

Tout à l’heure, avec Gérald (promo-manager des Acteurs De L’Ombre, NDLR), en Off, vous discutiez de votre identité visuelle. Que se passe-t-il ? 

Au début, on voulait que le groupe se concentre plus sur la musique, plus que sur les musiciens eux-mêmes. Bien sûr, tout ce qui a trait au graphisme est super important, mais montrer notre visage, c’était vraiment secondaire. J’admire beaucoup ces groupes comme Deathspell Omega, qui parviennent à conserver leur anonymat, c’est beaucoup de travail ! C’est compliqué à organiser et c’est très dur d’aboutir à un anonymat total ! Puis, on s’est pris au jeu des concerts. Rétrospectivement, je me dis qu’on a peut-être un peu trop négligé ce côté-là. J’ai du mal à prendre du recul par rapport à ça, mais notre but est que les gens se concentrent sur la musique et sur l’atmosphère. Si demain, quelqu’un doit nous remplacer sur scène, il devra n’y avoir aucun problème dans le sens où il faut que la musique et notre univers vivent.

Vous travaillerez toujours avec Les Acteurs De L’Ombre pour ce prochain album ? 

Je ne suis pas du genre à m’occuper de tout ce qui renvoie au business de la musique. Même si c’est une part importante, tout se passe très très bien avec Les Acteurs De L’Ombre. Déjà, on composera l’album, puis on se posera les bonnes questions en termes de business.

Tu habites sur Paris, néanmoins, tu connais bien la scène de la région de Nantes. 

J’y suis originaire ! J’ai déménagé à Paris, il y a quatre ans pour des raisons professionnelles. J’ai grandi au sein de la scène nantaise. Elle est hyper dynamique et a connu plusieurs générations au fur et à mesure, mais ce n’est pas vraiment une ville qui a été bercée par le Black Metal. Il y a une scène Hardcore, Thrash. Ça fait dix ans que Le Ferrailleur a ouvert. Maintenant tu as La Scène Michelet, qui fait un travail énorme. Tu as la scène classique, donc celle du Ferrailleur. La Scène Michelet, il y a vraiment une atmosphère, il y a beaucoup d’habitués. Au départ, on n’aurait jamais cru que ça deviendrait une valeur sûre…

Est-ce que tu connais des groupes du Nord ? 

(Pause, votre serviteur lui montre le poster du Tyrant Fest) Bliss Of Flesh ? Je ne savais pas ! À vrai dire, je n’ai jamais fait attention à l’origine géographique des groupes. Aucun groupe ne me vient à l’esprit !

Dans une heure, vous allez donc vous produire dans le cadre du Tyrant Fest. Vous étiez également à l’affiche l’année dernière quand le festival se déroulait encore à Amiens, à la Lune Des Pirates. Que penses-tu de son évolution? 

Quand ils nous ont contactés, on était enchantés, mais on ne comprenait pas pourquoi les organisateurs voulaient nous y faire jouer deux années d’affilée. On nous a expliqué que le festival avait totalement changé et qu’ils avaient axé les choses sur tout ce qui englobe la musique Black, notamment l’art. Quand on a commencé à jouer, on a vraiment travaillé notre image. Quand j’étais jeune, j’ai grandi avec des groupes qui ne ressemblaient à rien sur scène. Il n’avait pas d’univers, mais leur musique était bonne. Dissection, Emperor et tous les autres, eux, me faisaient voyager. En France, on s’ennuyait, ça ne vendait pas de rêve. Je trouve très bien d’avoir fait venir tous ces exposants.

Regarde Les Hommes Tomber, c’est :

Thomas : Chant

R.R. : Batterie

J.J.S. : Guitare

A.M. : Guitare

A.B. : Basse

Discographie : 

Regarde Les Hommes Tomber (2013)

Exile (2015)

A propos de l'auteur

Rédacteur en chef d'Heretik Magazine

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