C’est dans le cadre de la tournée de Cradle Of Filth en compagnie de Moonspell que la rédaction d’Heretik Magazine s’est permise de déranger Dani Filth dans son tour-bus afin d’échanger sur la conception de Cryptoriana – The Seductiveness Of Decay, un album résolument différent par rapport à Hammer Of The Witches, qui signait un tout nouvel ère pour le combo britannique avec l’arrivée des deux guitaristes de talent : Ashok et Rich Shaw. Entretien ! 

Propos de Dani Filth recueillis par Axl Meu le 20 février à Oignies


Comment votre tournée en compagnie de Moonspell se déroule-t-elle ? 

Superbement bien ! C’est du travail et c’est fatigant, car nous sommes sans arrêt sur la route et que nous nous produisons énormément. Pour cette tournée, nous devons assurer plus de quarante dates, ce n’est pas rien, et nous jouons tous les soirs ! Mais je devrais dire que tout se déroule à merveille. Le public est au rendez-vous, et les conditions d’accueil sont optimales. C’est vraiment une très belle tournée ! En comptant la date de ce soir, il nous restera encore 16 concerts à assurer !

Ce n’est pas la première fois que vous tournez avec Moonspell si je ne me trompe pas… 

Ça doit être la sixième tournée que nous faisons ensemble ! Puis, nous avons partagé l’affiche dans le cadre d’autres événements, comme les festivals, par exemple.

À ton avis, pourquoi ce package « Moonspell/Cradle Of Filth » fonctionne-t-il aussi bien ? 

Car les deux groupes se complètent ! Nous avons évolué en même temps, durant la même période, et les styles que nous appréhendons sont quand même assez proches !

En septembre dernier, Cradle Of Filth a sorti son douzième album. C’est le deuxième album que tu présentes avec ce nouveau line-up. En 2013, tu avais introduit deux nouveaux guitaristes : Ashok et Rich Shaw. Qu’ont-ils apporté à Cradle Of Filth ? 

Eux et Daniel Firth (le nouveau bassiste, NDLR) étaient fans de Cradle Of Fith bien avant de rejoindre le groupe, donc ils pouvaient voir les choses d’une autre manière et surtout apporter par la suite de nouvelles idées. Ils voulaient également jouer des morceaux que nous n’étions pas capables d’interpréter avant. Ce sont d’incroyables musiciens qui ont compris l’essence-même de Cradle Of Filth. Ils savent très bien ce qu’est Cradle Of Filth et peuvent ainsi proposer des idées pertinentes.

Chose rare chez Cradle Of Filth, vous n’avez pas changé de line-up entre deux albums. Pourquoi ? 

Tout simplement car ça marche très bien ! Avant, nous pouvions être quatre, cinq dans le groupe, maintenant, nous sommes six ! Aujourd’hui, nous écrivons la musique ensemble, comme un vrai groupe. Et oui, je pense sincèrement que le groupe a évolué et qu’un certain renouvèlement a opéré… On a réussi à saisir l’essence-même de ce nouveau line-up ! On s’est bien amusé en studio !

Tu me parles de renouveau… Quand je lis les commentaires que font les fans sur les réseaux sociaux, je m’aperçois qu’ils sont assez encourageants. Pour certains, Cradle Of Filth est vraiment de retour. Les deux derniers albums ont été très bien accueillis ! 

Oui ! Le prochain sera encore mieux ! Mais avant de nous pencher sur ce nouvel album, nous allons rééditer l’album Cruelty and The Beast. L’album sera remixé, remastérisé depuis les bandes originales. Ça sonne très bien ! Nous avons réussi à garder les atmosphères de cet album… Ensuite, une fois que nous aurions ressortir cet album, nous nous pencherons sur la suite. On devrait commencer à composer après la série de concerts que l’on donnera cet été. Je pense que le prochain album de Cradle Of Filth sera tout simplement extraordinaire ! Nous n’avons plus besoin de faire nos preuves, nous les avons déjà faites ! Du coup, nous pouvons expérimenter pas mal de choses et ainsi proposer des choses merveilleuses !

Hammer Of The Witches et Cryptoriana – The Seductiveness Of Decay sont deux albums sensiblement différents. Le dernier est bien plus Heavy alors que Hammer Of The Witches, lui, était plus Black Metal dans l’âme. 

Oui, c’est vrai. Les morceaux sont un peu plus progressifs et les guitares plus incisives sur le nouvel album. Et elles dégagent plus d’atmosphères. Faire un nouvel album, c’est assez toujours assez compliqué, on essaie toujours de se renouveler !

« Je pense que le prochain album de Cradle Of Filth sera tout simplement extra-ordinaire »

Dirais-tu que Cryptoriana – The Seductiveness Of Decay est la suite logique de Hammer Of The Witches ? 

Oui, je pense. Et le troisième album que nous ferons ensemble s’inscrira également dans ce que nous avons proposé sur les deux derniers.

Cryptoriana – The Seductiveness Of Decay est le quatrième album que vous avez produit avec Scott Atkins. Pourquoi ? 

Car toutes ses réalisations sonnent très bien ! Il sait aborder plusieurs genres musicaux et est à cheval sur la technologie. Il arrive à chaque fois à se renouveler ! En plus, il n’habite pas très loin de chez nous, c’est un réel avantage. C’est un chouette type, il travaille énormément. Si tu as une deadline précise à respecter, il va faire en sorte que l’album soit prêt dans les temps. Puis, c’est un perfectionniste… Et même si nous sommes amenés à travailler avec un autre producteur, je veux que ce soit lui qui s’occupe de mes parties vocales, tout simplement car c’est ultra-confortable de travailler avec lui ! Quand je suis avec lui, je me sens bien. Et si un soir, je veux enregistrer mes parties chez lui, je ne me pose pas de questions, j’y vais. Il habite à 20 kilomètres de chez moi !

Quelles libertés lui laisses-tu ? 

Je lui laisse assez de libertés. J’attends de lui qu’il soit franc, qu’il me dise si c’est bien ou non… C’est le rôle du producteur que de donner des conseils et de conduire les musiciens pour aboutir au meilleur album possible !

Sur Cryptoriana – The Seductiveness Of Decay, vous parlez à nouveau de sujets en rapport avec l’ère Victorienne. Il me semble que tu aimes beaucoup la littérature d’Oscar Wilde et de Sir Arthur Conan Doyle. Ce sont tes principales sources d’inspiration ? 

J’ai écrit beaucoup de choses ces dernières années, que ce soit en vers ou en prose. On aurait également pu mentionner Stevenson et d’autres personnalités littéraires. Quand il m’a fallu composé les paroles pour Cryptoriana – The Seductiveness Of Decay, j’étais prêt. J’avais lu pas mal d’ouvrages sur l’ère Victorienne. J’aime beaucoup cette période de l’Histoire britannique, pareil pour la musique qu’elle a générée. Elle est tout simplement fantastique.

Connais-tu des auteurs français ? 

Oui, bien sûr, et parmi eux il y a Charles Baudelaire, Joris-Karl Huysmans

Cradle Of Filth a réalisé un clip pour « Heartbreak And Seance ». Le mini-film est assez surprenant ! 

On a tourné le clip en Lettonie, et c’est la même personne qui s’est occupée et du clip et de la conception de l’artwork (Artūrs Bērziņš, NDLR). C’est également lui qui avait confectionné la pochette de Hammer Of The Witches. J’ai trouvé qu’il se débrouillait très bien. On a mis beaucoup d’énergie dans ce clip… Nous avons mis en boîte des scènes que l’on retrouve sur l’artwork et utilisé les mêmes personnages. Nous avions également comme projet de tourner un clip avant de partir en tournée, mais ça ne s’est pas fait par faute de temps. Mais oui, pour revenir à cette video, ce fut une très belle expérience et le résultat final est vraiment agréable.

La pochette de Cryptoriana – The Seductiveness Of Decay est un clin d’oeil à « La Naissance de Vénus » de Botticelli…  

Oui, mais l’ensemble est assez théâtral. Si tu regardes bien, tu t’apercevras que les personnes sont tous sur une sorte de scène. C’est un concept très Victorien. Les sujets sont quasi les mêmes, tu sais. Le respect des normes classiques, l’attraction vers la mort, ce côté spirituel, les sciences, le Darwinisme, le macabre…

« C’est le rôle du producteur que de donner des conseils et de conduire les musiciens pour aboutir au meilleur album possible ! »

La thématique de l’horreur est également au centre chez Cradle Of Filth. la vocation de Cradle Of Filth est-elle de faire « peur » comme ces groupes de Shock Rock ? 

Si nous devions appartenir à cette vague, nous appartiendrions à la catégorie la plus sombre, plutôt Death Shock Rock. Nous avons fait un certain nombre de choses choquantes par la passé, mais ce n’est plus trop le cas aujourd’hui.

En bonus-track du nouvel album figure cette reprise de « Alison Hell » d’Annihilator. C’est assez surprenant de votre part…

Ça faisait un moment que l’on voulait reprendre cette musique, cette idée devait dater de l’ère de Cruelty and the Beast. Ensuite, nous avons rencontré Jeff Waters, le type qui composé ce morceau, à plusieurs reprises, sur la route et au cours de la croisière 70.000 Tons of Metal. On a discuté et il m’a dit qu’il adorerait écouter tout cela. Puis, il faut que dire ce morceau correspond totalement à notre univers. Il est fortement influencé par la New Wave Of British Heavy Metal… Ses atmosphères sont très sombres. C’était parfait pour nous.

Avez-vous déjà songé à reprendre des morceaux de groupes plus récents comme Ghost ? 

(Il réfléchit)… Je pense que ce projet est encore trop jeune pour le moment pour que quelqu’un tente ce genre d’expériences. Si nous étions amenés à le faire, nous le ferions sans doute pour « Elisabeth ».

Peux-tu revenir sur les liens que tu entretiens avec Liv Kristine ? Après un featuring très remarqué sur « Nymphetamine Fix », tu as de nouveau fait appel à elle plus de dix ans après ce fameux duo pour un autre titre, « Vengeful Spirit ».

C’était une idée de notre producteur. Et en fait, nous ne devions pas faire appel à elle, mais il se trouve que la proposition de notre producteur était très pertinente. Liv a été très cool ! Elle a même reporté ses vacances pour venir enregistrer avec nous. Elle est venue avec ses idées. Ce titre fait écho au passé du groupe… C’est une évidence, mais nous n’avons pas procédé de la même façon que par le passé. « Vengeful Spirit » et « Nymphetamine Fix » sont deux morceaux très différents. « Vengeful Spirit » est un peu plus « thrashy » !

Vous aviez eu comme idée d’immortaliser un concert au Japon dans le cadre du Loud Park…

Ça ne s’est pas fait pour finir. Ce n’était pas « notre » concert. Nous nous étions produits dans le cadre d’un festival et nous n’avions pas assez de temps de jeu pour enregistrer un nouveau DVD digne de ce nom. Ça se fera à avenir !

Quel est le lien entre Cradle Of Filth et Devilment ? 

Moi ! (rires) Ces deux projets sont totalement différents ceci-dit. Devilment est plus un échappatoire qu’autre chose. Je suis occupé avec Cradle Of Filth, et Cradle Of Filth est mon groupe. Devilment est peut-être plus moderne dans sa démarche et je ne chante pas du tout de la même façon dans ces deux groupes.


Cradle Of Filth, c’est :

Dani Filth : Chant

Martin Skaroupka : Batterie

Daniel Firth : Basse

Richard Shaw : Guitare

Ashok : Guitare

Lindsay Schoolcraft : Parties narrées.

Discographie :

The Principle of Evil Made Flesh  (1994)

V Empire or Dark Faerytales in Phallustein (1996)

Dusk… and Her Embrace (1996)

Cruelty and the Beast (1998)

Midian (2000)

Damnation and a Day (2003)

Nymphetamine (2004)

Thornography (2006)

Godspeed on the Devil’s Thunder (2008)

Darkly Darkly Venus Aversa (2010)

The Manticore and Other Horrors (2012)

Hammer of the Witches (2015)

Dusk… and Her Embrace – The Original Sin (2016)

Cryptoriana – The Seductiveness of Decay (2017)

A propos de l'auteur

Rédacteur en chef d'Heretik Magazine

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