Pionnière de la scène Neue Deutsche Härte, la formation allemande Oomph! continue de publier des albums de bonne facture. La preuve en est, Ritual, le successeur de XXV, s’il ne renouvèle pas le style du groupe, a le mérite de lancer la nouvelle année comme il se doit. Quelques semaines avant la sortie de Ritual (prévu pour le 17 janvier prochain), le premier avec Napalm Records, la rédaction a saisi l’opportunité de s’entretenir avec Andreas Crap, le guitariste du groupe, afin qu’il nous dise tout ce qu’il faut savoir sur ce nouvel opus !
Propos d’Andreas Crap (Guitare, Clavier) recueillis par Axl Meu
XXV avait comme objectif de célébrer le 25ème anniversaire Oomph!. Qu’est-il de Ritual ?
De montrer que nous sommes toujours là après toutes ces années… On sort des albums pour célébrer notre créativité, notre univers à nous, la vie en elle-même. D’ailleurs, c’est pour cette raison que nous sommes musiciens d’ailleurs ! Nous faisons de la musique pour nous soigner, c’est une sorte de thérapie pour nous. On se bat contre nos démons personnels. C’est simple… De toutes manières, quand nos vies ne nous conviennent pas, nous faisons de la musique !
Ritual vous a quand même demandé trois ans. On peut dire que vous avez pris votre temps ! Pourquoi ?
Après la sortie de XXV, nous sommes partis en tournée et avons assuré la phase promotionnelle de l’album. Bien sûr, on a commencé par l’Allemagne, puis nous avons visité de l’Europe de l’Est avec des pays comme la Russie, l’Ukraine… Nous sommes également allés au Mexique. Pendant la période d’entre-tournée, nous avions commencé à écrire quelques morceaux pour l’album. Mais nous avions d’autres à assurer et surtout un autre projet. Nous nous étions lancés comme défi de donner un concert d’Ommph! avec un orchestre symphonique à Moscou ! C’était une date unique pour laquelle nous avions réarrangé quinze morceaux de notre répertoire. Le concert a été capté, mais nous ne savons pas quand le DVD sortira, peut-être pour nos trente ans !
Je me souviens que les retours au sujet de Des Wahnsinns Fette Beute (2012) n’avaient pas été très fameux. Ce disque qui faisait dans l’autodérision n’avait pas plu… Vous aviez pris un sacré risque à l’époque. Aujourd’hui, vous êtes quand même revenus à quelque chose de plus classique. Est-ce qu’il est difficile de prendre des risques aujourd’hui, même quand on s’appelle Oomph! ?
Je ne comprends pas… Ça a toujours été la marque de fabrique d’Oomph! de faire dans l’originalité. Tous nos disques sont différents… Et quand nous composons, nous essayons d’être authentiques et de faire preuve d’intégrité ! Si, en composant, tu te demandes ce que le fan voudrait entendre sur le prochain disque, il est possible que tu perdes ce « truc » qui rend ta musique unique… Un album, quoi qu’il arrive, se doit de te refléter. Si, en composant, tu ne ressens pas tant d’agressivité que ça en toi, pourquoi devrais-tu faire un disque agressif ? Là, pour Des Wahnsinns Fette Beute, on avait voulu faire dans l’autodérision. En tout cas, nous avons remarqué, au fil des années, et quelques soient les styles, que les gens étaient de plus en plus conservateurs. Certains fans font tout pour empêcher toutes tentatives d’évolution ! En tant qu’artiste, je ne comprends pas du tout ce point de vue ! Tout change autour de nous et les gens en ont peur, c’est un peu paradoxal ! Ce qui est sûr, c’est que nous devons éviter de nous répéter… Je trouve ça assez embêtant de voir un groupe faire la même chose encore et encore année après année ! Ommph! est aujourd’hui considéré comme le fer de lance d’un style, le Metal Industriel… Il existe aujourd’hui, car nous avons osé, car nous sommes sortis des sentiers battus.
« nous avons remarqué, au fil des années, et quelques soient les styles, que les gens étaient de plus en plus conservateurs »
Et donc Ritual, votre nouvel album, de quoi parle-t-il ?
Nous voulions tout simplement trouver un titre d’album qui puisse représenter la violence qui se dégage de la musique et des paroles. Nous ne voulions pas que « Ritual » soit le titre d’un des morceaux de l’album, mais qu’il englobe la totalité de l’album, tu vois quoi ? ‘’Ritual’’… Le monde est rempli de « rituels ». Il y a des rituels qui sont bon-enfants, qui permettent de rassembler les gens, d’autres qui sont totalement nuisibles, comme les rituels meurtriers, et les autres qui ne servent à rien ! J’imagine que ce titre parle à tout le monde. C’est le même mot en anglais et en allemand, presque le même en français… Nous chez Oomph!, nous avons également nos rituels à nous… On se réunit avant de me monter sur scène et on lance : « Guten Appetit ! » (rires)
L’artwork est également très réussie ! Elle est sensiblement différente par rapport à celle de XXV. J’imagine que ce n’est pas le même artiste qui s’en est occupé.
Oui ! C’est un autre artiste. D’ailleurs, c’est également lui qui s’est occupée de nos photos-promo. Son nom est Stefan Heilemann (Heilemania). C’est la première fois que nous travaillons avec lui. L’artwork qu’il nous a faite est vraiment pas mal. Elle représente une femme en train de se faire couronner, mais on se sait pas si c’est contre sa volonté ou non. Tu peux donc l’interpréter comme tu le souhaites !
Est-ce que vous allez sortir un video-clip pour promouvoir Ritual ?
Ce n’est pas encore très clair pour nous. Nous ne savons pas encore quelle chanson nous allons sélectionner pour ce fameux clip. On verra bien ! C’est toujours compliqué pour un musicien de sélectionner une chanson tu sais… Si l’album est réussi, il les aime toutes. C’est le cas pour nous. Puis, c’est toujours très sympa de jouer en live les morceaux qui font l’objet d’un clip. Ça nous permet de diffuser le clip en fond !
Oomph! est un pionnier du Metal Industriel avec Killing Joke, Laibach, Fear Factory et Rammstein… La scène a évolué depuis, mais pour vous, comme tu dis, on reconnaitra toujours votre touche. On vous met également dans la case du « Neue Deutsche Härte » (mouvement culturel et musical allemand regroupant des groupes comme Rammstein, Stahlhammer, Megaherz dans les années 90…). Peut-on encore parler de Neue Deutsche Härte aujourd’hui pour Oomph! ?
Eh bien, ce n’est pas à nous de le dire ! Oui, nous sommes les pionniers de ce style et certains nous disent que des groupes Rammstein, Scheweisser et d’autres n’auraient pas été les mêmes sans nous. Quand on a lancé le groupe, notre projet était d’assembler différents styles de musiques que nous apprécions ensemble. D’un côté, il y avait le côté « Electro » de tous ces groupes de New-Wave, de Pop, de Neue Deutsche Welle comme Liaisons Dangereuses, The Cure, Depeche Mode et de l’autre, l’agressivité des groupes de Hard Rock comme AC/DC, Motörhead, Iron Maiden… Avant, tout était séparé, les Metalleux détestaient ceux qui écoutaient de l’Electro, et vice-versa. Nous, nous aimions les deux styles, alors nous les avons combinés. C’est ce que nous avons fait à la fin des années 80 en formant Oomph!. Certains sont même allés dire que l’album Sperm était le berceau de ce mouvement que l’on nomme Neue Deutsche Härte aujourd’hui. Mais rien n’était prémédité, c’est venu comme ça !
« On peut vraiment lire de tout sur les forums… Et quand on fait le tri (…) on peut résumer tous les commentaires à trois gros sujets : le terrorisme, le sexe, et… Hitler ! »
Vois-tu de jeunes groupes qui pourraient prendre la relève ? Personnellement, de notre côté en France, très peu de jeunes groupes s’essaient au Metal Industriel… Ce n’est pas le style de Metal le plus populaire aujourd’hui !
J’en connais, j’en connais. Il y en, pas beaucoup, c’est vrai, mais ça nous va ! Ce n’est pas un style facile à appréhender. En vérité, c’est tellement facile de tomber dans le cliché et de manquer d’authenticité quand tu joues ce genre de musique. Peut-être que c’est une des raisons qui poussent les musiciens à ne pas se lancer ! Mais je m’en moque ! Après, qu’est-ce qui est populaire aujourd’hui ? Il y a tellement de genres, de sous-genres… Et les styles ont une durée de vie si courte aujourd’hui ! Il y a trop d’albums qui sortent et on ne sait jamais ce qui viendra après ! J’ai comme l’impression que les gens consomment les albums et les styles sans vraiment creuser, comme s’ils avaient tous des troubles de l’attention ! (Rires)
Il y a douze années de ça, le groupe avait rencontré quelques problèmes lors de la diffusion du clip « Gott Ist Ein Popstar »… Tu crois que la situation s’est empirée aujourd’hui ?
Déjà, nous devons prendre conscience qu’il y a beaucoup d’extrémistes et de démagogues partout dans le monde, que ce soit pour la politique ou la religion. Aujourd’hui, dans l’ère du numérique, on peut vraiment lire de tout sur les réseaux sociaux, les forums… Et quand on fait le tri dans tout cela, on peut voir qu’on peut résumer tous ces commentaires à trois gros sujets : le terrorisme, le sexe, et… Hitler ! C’est d’ailleurs ce que nous dénonçons à travers le titre « TRRR – FCKN – HTLR » présent sur notre nouvel album. C’est vraiment triste d’en arriver là… Car nous ne pouvons pas résumer notre existence à trois sujets. Quoi qu’il arrive, quoi qu’on fasse, il y a toujours les mêmes sujets qui reviennent et ça a toujours un lien avec le pouvoir, que ce soit pour la religion et la politique.
J’ai lu que votre album, Wahrheit Oder Pflicht (2004), venait d’être primé « Disque de Platine » ! Dis-donc, il faut patient !
Oui ! C’est dingue d’avoir reçu ce prix après toutes ces années ! Je veux dire, ça fait pas mal de temps que nous sommes là… C’est ça le secret de Oomph! ! Ça veut aussi aussi dire que nos fans sont patients et qu’ils gardent la foi ! (Rires) Les gens qui nous suivent continuent de s’intéresser à notre musique ! Oomph! n’est pas un effet de mode !
Dans le cadre de votre tournée promotionnelle, vous allez vous produire à La Laiterie (Strasbourg) le 17 mars prochain et à La Machine du Moulin Rouge (Paris) le 20 mars prochain. Vous aimez la France, il me semble… !
Oui ! Nous entretenons des liens très particuliers avec les fans français. Il me semble que la France est le premier pays à nous avoir adoptés, en dehors des groupes germanophones ! On a pas mal de fans chez vous, votre accent français est très amusant je dirais même ! Chez vous, on attire un public plutôt masculin, ce qui n’est pas forcément le cas ailleurs ! Dommage pour nous ! (rires) En tout cas, à côté de ça, nous aimons beaucoup le France. Je me suis rendu une paire de fois sur la côte d’Azur et je vais régulièrement skier chez vous en hiver…
Oomph!, c’est :
Crap : Guitare, Clavier
Dero : Vocals, Batterie
Flux : Guitare, Sampling
Silvestri : Batterie (Live)
Hagen : Basse (Live)
Felix : Clavier (Live)
Okusa : Percussions (Live)
Discographie :
Oomph! (1992)
Sperm (1994)
Defekt (1995)
Wunschkind (1996)
Unrein (1998)
Plastik (2000)
Ego (2001)
Wahrheit oder Pflicht (2004)
GlaubeLiebeTod (2006)
Monster (2008)
Des Wahnsinns Fette Beute (2012)
XXV (2015)
Ritual (2019)
Laisser un commentaire