Le Folk Metal compte encore beaucoup d’adeptes, et il fallait finalement être de mauvaise foi pour dire que ce mouvement n’intéresse plus que les piliers de bar. Car même si le genre compile à lui seul tous les clichés du metalleux alcoolique, il n’en demeure pas moins un style plébiscité. Il fallait être au Splendid de Lille le mardi 26 février dernier dans le cadre du passage du Wayfarers & Warriors Tour 2019 (avec Korpiklaani, Turisas et TrollfesT), et plus particulièrement à l’entrée de l’ancien cinéma, pour s’en rendre compte. Il n’est que 17h30 et une centaine de bon-vivants font déjà la queue pour accéder la fosse. On comprend très vite leur enthousiasme : assister à un concert de Folk Metal, c’est s’assurer de se goinfrer de rythmiques lancinantes et entêtantes sur fond de guitares agressives, mais c’est aussi et surtout la promesse d’un voyage épique et merveilleux, un voyage dont seuls les protagonistes ont le passeport. Encore nous fallait-il arriver à l’heure pour le lancement des hostilités prévus pour 18h30 ! Beaucoup des fans sont encore au bureau, et accéder à la vieille salle de Lille s’avère bien plus compliqué que prévu surtout aux heures de pointe ! La rédaction d’Heretik Magazine fait partie des chanceux qui sont arrivés à temps pour assister au concert des Norvégiens de TrollfesT.
Photos + Report par Axl Meu
La prestation de TrollfesT est franchement attendue par le public (certains ne sont d’ailleurs venus que pour eux). Il faut dire qu’elles sont toujours sources d’animations diverses et variées dans la fosse. Et n’en déplaise aux détracteurs, c’est tout vêtus de costumes, de robes de princesse et grimés de maquillages « clownesques » que les Norvégiens (menés de main de maître par le roi gargantuesque Trollmannen), investissent la scène du vieux cinéma. Alors, pas la peine de vous faire un dessin, chez eux, tout n’est que parodie. Ici ce sont les contes merveilleux des frères Grimm et de Charles Perrault (Cendrillon, La Belle Au Bois Dormant…) qui en prennent pour leur grade.
Et on ne vous cache pas que la pilule passe assez mal chez Heretik. Malgré une certaine envie d’en découdre (tous les musiciens font les cent-pas sur scène et le roi ne cesse de demander à ses fidèles à réveiller la fosse), les compositions tournent en rond et oscillent entre le très moyen et le pathétique. Pourtant les clowns aspirent à faire dans l’originalité. En atteste la langue qu’ils ont mis au point pour leurs compositions, la « trollspråk »… Mais de là à reprendre « Toxic » de Britney Spears ? D’ailleurs, il est fort probable que la formation ait bâti sa réputation grâce à cette reprise. C’est fort possible vu l’engouement des metalheads dans la fosse. Question dignité, on repassera. À côté, on retiendra néanmoins quelques bons moments, notamment la farandole « pseudo-épique » lancée par le bassiste, Lodd Bolt, en presque fin de gig. Bref, malgré une prestation au goût assez curieux dans l’ensemble, TrollfesT fait le taff et se met le public dans la poche.
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On ne savait pas trop à quoi s’attendre avec Turisas. Il faut dire que les nouvelles des Finlandais se sont faits plus ou moins rares ces dernières années. Où étaient-ils passés ? À part quelques prestations sur notre sol, les fans n’ont rien eu de neuf à se mettre sous la dent depuis Turisas2013. Ceci dit, c’est bien décidé à reconquérir son public que Mathias Nygård, tout cuirassé qu’il est, lance les hostilités avec le tonitruant « As Torches Rise », vite soufflé par « A Portage To The Unknown », marqué par l’apparition scénique de Caitlin de Ville au violon. Alors n’ayant rien de nouveau à proposer, les membres du Turisas (toujours le visage zébré) interprètent une partie des standards et piochent un peu partout dans leur répertoire pour faire le plus bel effet. Et ça marche. Le public se prête facilement au dépaysement tant attendu en cette soirée de Folk, sans doute grâce à la grâce de Caitlin, au charisme de Mathias Nygård, à ces refrains épiques et entêtants, l’interprétation qualitative qui va avec !
Pourtant ponctuée par quelques interventions plutôt poignantes au sujet de l’évolution de l’industrie de la musique, d’autres moments très sympathiques comme cette pluie de neige artificielle sur « Stand Up And Fight », l’interprétation du classique « Rasputin » (la reprise de Boney M.) et le solo de violon proposé par Caitlin, la prestation s’éternise. À vrai dire, nous ne comprenons pas les raisons qui ont poussé les Finlandais à terminer sur deux relectures acoustiques de « The March Of Varangian Guard » et de « For Your Own God », après un « Rasputin » qui avait embrasé le public à lui tout seul. Après ce faux petit break, peu ont porté attention à la fin du gig. Peut-être aurait-il fallu inclure ces deux relectures à un moment plus stratégique, de sorte à calmer les ardeurs des guerriers du pit avant le hit du concert ? C’était toutefois un très bon concert !
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Pour beaucoup et malgré des albums qui ne font plus l’unanimité, Korpiklaani reste une référence du Folk. La fosse du Splendid est malgré tout bondée et tout cela, les Finlandais le doivent à leur réputation de bons vivants (et sans doute à leurs classiques, fortement attendus ce soir, notamment « Vodka » et « Tequila », hymnes de toute une génération). Mais à croire qu’il s’agit d’un jour « sans » pour les Finlandais qui, à vrai dire, nous livre un concert sans âme. Jonne Järvelä, le chapeau vissé sur le crâne, fait le strict minimum sur scène, Rounakari (violon) tire littéralement la tronche, et les autres se contentent d’interpréter à la lettre sur une grosse partie du passable Kulkija (dix morceaux au total…). Il est clair que niveau setlist, on s’attendait à mieux, même si quelques passages du nouvel album ont le mérite de faire évoluer les sonorités du groupe, notamment « Sillarakentaja » et ses riffs très sabbathiens dans l’âme et « Kallon Malja », décrit comme le morceau le plus long du répertoire des Finlandais par un Jonne à bout de souffle…
Car oui, l’homme aux dreadlocks est au bout du rouleau et surtout, plein comme un œuf ! Il parvient à peine à assurer ses vocalises, et surtout, il doit s’aider d’un prompteur, chose inconcevable compte tenu de son âge (44 ans !) ! Oui, d’un coup, le voyage épique et bucolique prévu prend une toute autre tournure, surtout que les musiciens ne semblent pas trop prendre leur pied, contrairement aux fans qui n’y voient que du feu : ils continuent de se rentrer dans le lard dans le pit, un fan placé aux barrières envoie même un drapeau du Hellfest Cult à Jonne, une bannière dont le leader ne prête pas trop attention ! Une autre preuve de ce désintérêt ou de cet état d’ébriété ? Le leader ne revient pas sur scène pour interpréter « Beer Beer » (version « Shai Shai ») avec Nytt Land, invité surprise de la soirée… Oui, on sait désormais pourquoi beaucoup sont partis avant le final de « Vodka ». La faute à ce concert très décevant, indigne d’un groupe de cette envergure – des propos et impressions qui sont revenus à maintes reprises à la sortie du concert.
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Chose impensable il y a encore quelques mois, Turisas a volé la vedette à Korpiklaani ce soir au Splendid ! Et si Jonne et sa bande prenaient un peu de repos avant de revenir de plus belle ? En tout cas, à croire que les nombreuses tournées prévues pour promouvoir Kulkija(notamment dans le cadre des grands festivals d’été), ce n’est pas encore d’actualité…
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