Alors que ses fans s’attendaient à ce que Nostromo publient un nouvel album, les Suisses, alors remis d’une petite crise interne, lâchent dans la nature Narrenschiff, un autre EP, plus long cette fois-ci, qui puise son inspiration de la célèbre œuvre de Sébastien Brant, La Nef Des Fous (Narrenschiff, en allemand). À cette occasion, Lad et Jérôme, respectivement bassiste et guitariste du groupe, ont bien voulu jouer au jeu des questions-réponses.
Propos de Lad (basse) et Jérôme (guitare) recueillis par Axl Meu
Narrenschiff, votre nouvel EP, sort demain dans les bac. Ressentez-vous une certaine pression ?
Lad : Honnêtement, je ne ressens pas la pression. Personnellement, je ne réalise pas encore qu’il va sortir. J’attends les retours pour voir ce qu’il en est, parce que pour le moment, on a encore la tête dans le guidon…
Jérôme : En ce qui me concerne, je suis assez fier de nous, on a bien respecté le ‘’timing’’ qu’on s’était fixé. On a quand eu du mal à le pondre cet EP… Il faut dire qu’on a eu des problèmes de line-up et d’autres problèmes avec l’équipe avec qui on travaillait. Voilà, on est assez fiers, nous avons fait de notre mieux.
Narrenschiff est donc la suite logique du « deux titres » que vous aviez sorti l’année dernière. Pour ce nouvel objet, on reste sur le format de l’EP… Vos fans s’attendaient pourtant à un nouvel album.
Lad : Oui, nous aussi… mais il se trouve qu’avec les problèmes qu’on a rencontrés, ça n’a pas pu se faire. Ces derniers mois, on a vraiment perdu notre temps à se prendre la tête. Le nouvel album sortira, mais pas maintenant. Quoi qu’il en soit, soyez-en sûrs : Nostromo va sortir un nouvel album !
J’imagine que les problèmes dont vous faites allusion ont un rapport avec votre ancien batteur…
Oui, c’était un événement assez particulier pour le groupe, assez « énergivore », je dirais…
Mike est parti du groupe…
Il n’est pas parti de lui-même. Disons que la situation s’est envenimée. On s’est quittés sur un commun accord. Ça ne jouait plus et c’était devenu n’importe quoi. Je n’ai plus envie d’en parler, ça n’en vaut vraiment pas la peine. De notre côté, on a vraiment tourné la page. Désormais, on a un excellent batteur, et il se trouve qu’il nous a ouvert pas mal de portes. Niveau efficacité, c’est clairement autre chose ! On est vraiment satisfaits, désormais, on avance. Les membres de Nostromo sont au service de la musique, ce qui n’était pas le cas de certains qui préféraient se mettre en avant eux, plutôt que le groupe.
Votre nouveau batteur, c’est Max Hansen. Jérôme, tu le connais bien, pour avoir joué avec lui au sein de Mumakil…
Oui, ça faisait un moment qu’on se connaissait. Puis sur le plan « humain », ça collait vraiment bien entre lui et les autres membres de Nostromo. Puis, même s’il jouait moins bien que Mike, ça n’aurait pas été un problème. Cela dit, ce n’est pas le cas ici. Quand il nous a fallu trouver un nouveau batteur, j’ai directement pensé à lui, c’est une crème ! On a également la chance d’avoir eu Kevin Foley sous le coude, c’est lui qui a assuré l’intérim quand on n’avait pas encore Max. Je savais que je pouvais compter sur lui. Ils sont vraiment cool.
Les styles de Nostromo et Mumakil sont sensiblement différents. Jérôme, ça n’était pas trop difficile de revenir à des musiques plus Hardcore après avoir joué dans un groupe comme Mumakil quand Nostromo était en pause ?
Pour moi, le plus important, c’était tout simplement de retrouver mes amis. Et vu comment la musique a évolué, ça m’aurait embêté de faire la même chose qu’à l’époque. Personne ne veut faire du Mumakil au sein de Nostromo ! Néanmoins, si on peut tirer profit du niveau de jeu de Max et composer des morceaux plus bruts et plus rapides, on le fera. On ne va pas se priver !
« Nostromo en live, ça a toujours été mon poing dans ta gueule. On n’est pas là pour chanter des comptines »
D’ailleurs, sur l’EP, vous êtes revenus à des sonorités plus Metal, qui sont très loin des sonorités acoustiques d’Hysterion Proterion. Là, vous revenez avec du Hardcore bien couillu !
On n’a jamais vraiment arrêté de faire dans ce style. À l’époque, Hysterion Proterion n’était qu’un « one-shot ». Cet album, on ne l’a joué que trois fois sur scène. C’était une belle expérience, mais nous ne faisons pas dans la musique acoustique. Nostromo en live, ça a toujours été mon poing dans ta gueule. On n’est pas là pour chanter des comptines.
Si j’ai bien compris Narrenschiff est un concept-EP…
Lad : Concept est un bien grand mot ! Narrenschiff n’est pas un EP conceptuel. Disons plutôt qu’on s’est imprégnés de l’œuvre de Sebastien Brant pour le fil conducteur. Il se trouve que la thématique de la « Nef Des Fous » correspondait bien au message que l’on voulait faire passer dans les textes. Dans l’ensemble, on a essayé de combiner tout ça à l’idée de naufrage. C’est un peu de ça que parle le poème de Brant, qui est empreint de pessimisme et qui traite de la dérive sociale. Nous, de notre côté, on parle plutôt de dérives personnelles liées à des troubles de comportement, comme l’ego… C’est plutôt ça. Ensuite, on a trouvé que l’imagerie associée à tout ça était bonne, magnifique d’ailleurs. Javier, notre chanteur, a réussi à reprendre l’image de cette statut se trouve à Nuremberg… Il en a fait un très bel artwork ! Ce qui est également intéressant avec « La Nef Des Fous », c’est sa portée historique. À l’époque, au XVème siècle, on mettait les fous, les aliénés au ban de la société, sur des nefs. Sur le plan métaphorique, on peut rapprocher tout ça à ce qu’on a fait aux gens de notre entourage.
Est-ce que l’on peut dire que votre musique vous fait l’effet d’une « catharsis » ?
Jérôme : Oui, on peut dire ça… Je parle couramment le Français, mais parfois j’ai du mal à m’exprimer avec des mots. C’est plus facile avec des rythmiques et des intervalles… Ce qui est bien avec la musique, c’est qu’elle est libre d’interprétation. Tu es libre de comprendre ce que tu veux, en fonction de tes ressentis personnels. Au sein de Nostromo, les quatre musiciens n’envisagent pas la musique de la même façon, et c’est peut-être pour cette raison que ça fonctionne entre nous aujourd’hui. On y trouve tous notre compte, le cas inverse, on ne continuerait pas. D’ailleurs, c’était pour cette raison qu’on avait lâché l’affaire en 2005. Ça n’allait plus, donc on a dérivé chacun de notre côté.
Vos sources d’inspiration ont-elles évolué depuis 2005 ? Ecoutez-vous la même chose ? La scène Hardcore a quand même bien évolué depuis…
Je ne sais pas si on peut qualifier notre musique de Hardcore… Javier (chant, ndlr) est fan de tout ce qui se fait en matière de Post-Hardcore, mais pas moi… Je pense qu’on a toujours les mêmes bases, Napalm Death, Nasum. On écoute aussi de nouvelles choses… Personnellement, je continue d’aimer Morbid Angel, Carcass, mais aussi Gadget, Gorguts et d’autres encore. Nostromo n’est, certes, pas un groupe de Grindcore, mais ces groupes ont eu beaucoup d’impact sur moi.
« Aujourd’hui, on y trouve tous notre compte, le cas inverse, on ne continuerait pas »
D’ailleurs, sur le fameux EP « 2 titres » que vous avez sorti l’année dernière figure une reprise de Nasum : « Corrosion »… Vous l’aviez reprise afin de rendre hommage à son chanteur/guitariste Mieszko Talarczyk, victime du tsunami du 26 décembre 2004 en Thaïlande. Pourquoi teniez-vous lui rendre hommage 15 ans après cette catastrophe ?
Tout simplement car on n’avait pas eu l’occasion de le faire avant… On a enregistré ce « deux titres » dans l’urgence avec Kevin (Foley, ndlr) à la batterie, histoire de rappeler que l’on fait encore des trucs qui »butent » ! On a accéléré le tempo comparé à l’original…
Pour Narrenschiff, vous avez travaillé avec Joan Mayer. C’était comment ?
Il a très bien travaillé ! (Rires) Il a tout de suite saisi nos idées et le propos du groupe. On avait déjà les morceaux qui étaient bien en place, il était là pour donner quelques conseils ici et là. On a passé trois semaines ensemble, c’était très intense, et je pense que ça se ressent !
C’est la première fois que vous travailliez avec lui…
Oui, on l’a croisé dans le cadre de la tournée qu’on a effectuée en première partie de Gojira (2017, ndlr). Comme on est suisses, nous n’avons pas eu trop de mal à échanger. Par la suite, je l’ai appelé et lui ai demandé si ça l’intéressait d’enregistrer notre EP. Puis ça s’est super bien passé, on a enregistré le « bousin » chez moi, en Suisse.
Cette rencontre remonte donc à la tournée que vous avez effectuée en première partie de Gojira qui, avouons-le, vous a permis de reconquérir une partie de votre public…
Nous, à l’époque, on ne s’en rendait pas compte. Ce n’est qu’après que nous avons réalisé que le public ne nous avait pas oubliés ! On a eu beaucoup de chance. C’est ce groupe qui nous a à nouveau propulsés sur le devant de la scène. Même que certains avaient pu nous découvrir !
Et par la suite, il y a eu les fameuses rééditions…
Oui, voilà, on a réalisé qu’il y avait une vraie demande ! Nos fans étaient vraiment chauds comme la braise ! (Rires)
Donc, pour résumer, le full-length, ce n’est pas encore pour maintenant…
Pour le moment, on se focalise sur Narrenschiff, il sort demain en auto-production. On va par la suite démarcher des labels et autres pour la suite. Nous n’allons pas tout décider, mais essayer de faire ça au plus vite… En tout cas, nous prévoyons d’entrer en studio en fin d’année… Après, advienne que pourra !
Votre dernière grosse date dans le Nord remonte au 2 décembre 2017. C’était à Béthune, au Théâtre Du Poche. Vous aimez le Nord ?
C’est toujours la guerre quand on se produit chez vous. En plus, vous avez un accent extraordinaire, bien plus folklorique que le nôtre, bien plus exotique… Vous avez les meilleures bières du monde ! À chaque fois que nous nous sommes produits chez vous, nous avons été très bien accueillis ! (rires)
Nostromo, c’est :
Javier Varela : chant
Jérôme Pellegrini : guitare
Lad Agabekov : basse
Max Hänsenberger : batterie
Discographie :
Selfish (1997 – Single)
Argue (1998)
Eyesore (2000 – EP)
Ecce Lex (2002)
Blockheads / Nostromo (2002 – Split)
Hysteron-Proteron (2004)
Uraeus (2018 – EP)
Narrenschiff (2019 – EP)
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