La carrière d’une formation est souvent semée d’embuches et quand une crise interne fait surface, il convient de prendre le temps et de trouver les bonnes solutions. Ces dernières, Johann Cadot, le leader d’Asylum Pyre, les a trouvées. Pour son groupe, le remue-ménage s’est imposé et tout fort d’une nouvelle chanteuse : Ombeline Dupray alias « Oxy », et d’un nouveau line-up. En découle donc ce N°4, un album accouché dans la douleur certes, mais peut-être le meilleur à ce jour, enterrant si pied sous terre le malaimé Spirited Away. Dans un bar parisien, Johann et Ombeline nous ont donné rendez-vous Hyass et moi-même pour nous parler de ce Asylum Pyre 2.0. et de ses convictions !

Propos de Johann (guitare, programmations) et Ombeline (chant) recueillis par Axl et Hyass


Vous voilà enfin avec votre quatrième album, il s’intitule N°4. Si mes souvenirs sont bons, il y a eu beaucoup de « remue-ménage » entre Spirited Away et ce nouvel album ! Ombeline, tu es arrivé courant 2016… Comment ton intégration s’est-elle déroulée ? 

Johann : Quand on a enregistré Spirited Away, tous les gens impliqués dans cet album étaient dans une phase chaotique de leur vie, que ce soit dans le groupe ou dans leur vie personnelle. C’était assez compliqué, vraiment. Automatiquement, des tensions entre les membres sont arrivées, car on n’avait pas les mêmes envies. 

Tu nous avais dit « en off » que tu n’étais pas du tout satisfait de la qualité sonore de Spirited Away…

(Rires) Oui, c’est ça, mais je serais incapable de te dire pour quelles raisons… Je ne sais pas, quand tu le réécoutes et que tu le compares avec N°4, on sent tout de suite la différence. En vérité, Spirited Away aurait dû sonner comme N°4, l’histoire a fait que non… Mais je garde dans un petit coin de ma tête l’idée de le ré-enregistrer dans de meilleures conditions !

Ombeline, tu es vraiment, si je peux me permettre, le gros changement de ce nouvel album. Comment la rencontre entre toi et Johan s’est-elle goupillée ? 

On s’est rencontrés par le biais de Steve (guitare, ndlr) qui est passé par Malemort, Dead Bones Bunny et d’autres groupes parisiens. C’est un excellent ami, et il se trouve qu’il a échangé avec Johann… Il cherchait une nouvelle chanteuse et Steve lui a donné mes coordonnées. On s’est donc rencontrés et il m’a fait passer une audition… Et pour le coup, je n’étais pas très satisfaite de ma prestation. Néanmoins Johann m’a quand même laissé carte blanche pour les intentions de chant. Pour moi, il était tout simplement inconcevable de ne me limiter qu’à une seule couleur vocale… Ce n’est pas quelque chose que je voulais faire, et il se trouve qu’on avait le même niveau d’exigence, dans le sens où on voulait qu’il y ait une cohérence entre les textes et les guitares. Il y a vraiment un gros travail qui a été fait à ce niveau-là !

Ombeline, comment qualifierais-tu ta voix ? 

Je ne saurais pas qualifier ma voix… Au départ, quand j’ai commencé la musique, j’étais saxophoniste, et dans tout ce que j’écoute, on peut y trouver du Jazz, mais aussi du Rock Prog’. Bref, je suis quand même assez curieuse quand il s’agit de musique. Après, j’aime beaucoup tout ce qui sonne assez bien… J’ai une voix assez chaude, et c’est quelque chose que j’aime bien exploiter… J’essaie également sortir du lot en sortant des petits étranges qui mettent les gens mal à l’aise (rires). Mais à part ça, j’ai vraiment du mal à qualifier ma voix… Beaucoup me comparent à Amy Lee (Evanescence, ndlr)… Bien à eux, mais personnellement, je n’arrive à coller une identité précise à ma voix… 

Là où je trouve que vous vous êtes surpassés, c’est bien dans l’agencement des morceaux et de ses passages électroniques. Je trouve que c’est bien plus propre que sur Spirited Away… Comment avez-vous procédé pour ce nouvel album ? 

Johann : Pour tout ce qui est « boucle » et « sonorités au clavier », pour la première fois dans l’histoire du groupe, c’est moi qui m’en suis occupé. Je me suis servi de toutes les connaissances que j’ai acquises lors de la conception des autres albums. En général, je parvenais à m’en sortir, même si je dois avouer que par moments, l’aide de spécialiste était la bienvenue ! Je me suis occupé des guitares, des claviers, mais je me suis entouré de personnes expérimentées et bien connues dans le milieu pour la batterie et le basse, notamment Thomas Calegari (batterie, ndlr) et Pierre Emmanuel Pélisson (guitare, ndlr) qui ont déjà pas mal d’expérience derrière eux. Puis, on a retravaillé tout ça avec Nils Courbaron et poli les claviers. En général, ça part d’une base, d’un état d’esprit et d’une première ligne de chant. On travaille bien et on construit autour de ça.

Ombeline : On les travaille très bien même ! (Rires) On a vraiment passé beaucoup de temps sur les maquettes. Et les proches qui les ont écoutés avant tout le monde nous ont même dit ça pouvait être commercialisable ! Peut-être pas, mais ça fait plaisir à entendre ! 

Johann : Pour ce qui est de l’ingénieur-son, on s’est rapproché d’Angelo Emanuele Buccolieri. On l’avait rencontré en 2016 lors de notre tournée en compagnie de Rhapsody Of Fire et d’Iron Mask en 2016. C’était lui l’ingénieur-son d’Iron Mask… Bref, quand nous avions commencé à réfléchir sur un ingénieur-son qui puisse nous produire, on n’était jamais trop satisfait par ce que nous envoyaient ceux qu’on avait contactés. Et Thomas a évoqué le nom d’Angelo. On l’a contacté, et ça a collé direct. D’emblée, il était à fond dans l’album et ce, pour toutes les phases de sa conception. Il nous a aidés à tout fignoler !

« Spirited Away aurait dû sonner comme N°4… L’histoire a fait que non, mais dans je garde dans un petit coin de ma tête l’idée de le ré-enregistrer… ! »

Du coup, est-ce que vous avez pris beaucoup de temps à mettre l’album en boîte ?  

Ombeline : L’enregistrement de l’album s’est étalé sur plusieurs mois. En décembre 2017, tout était presque fini, et on a commencé à enregistrer les pistes de batterie en février 2018… Les prises de chant avaient été faite il y a pile un an ! 

Johann : N°4 n’est peut-être pas l’album qui a demandé le plus de temps, mais je ne dirai pas que nous l’avons enregistré le plus vite. C’était le premier, qu’on avait enregistré en trois semaines. Mais N°4 nous a pris moins de temps à être mis en boîte par rapport aux deux derniers. La batterie a été captée en une semaine, le chant en cinq jours, donc c’était quand même très challenging, il y a quand même dix nappes de chant en moyenne par morceau ! Il nous fallait tout enregistrer, tout polir. Certains titres comprennent pas moins de 130 pistes, c’est vraiment beaucoup ! (Rires)

À l’écoute de l’album, je me suis rendu compte que la place accordée aux refrains était très importante. Il me semble que vous vous êtes fortement inspirés de la vague Power Rock Metal de Scandinavie, notamment des groupes comme Beast In Black et Battle Beast…

Johann : Quel que soit le style, quel que soit la démarche artistique, ce qui me plaît le plus à moi, avant toute chose, c’est la place qu’on accorde aux refrains. Vraiment, dans tous les styles, c’est vraiment quelque chose qui me porte… C’est un peu le côté « bonbon » qui rassure…

Ombeline : En fait, ce qui est bien avec le répertoire d’Asylum Pyre, c’est qu’on peut reprendre nos titres uniquement en configuration chant/guitare. C’est une règle de base. Une bonne chanson, tu peux la reprendre dans n’importe quel style… C’est une règle qui se vérifie assez souvent… Les refrains qu’écrit Johann fédère et j’irai même jusqu’à dire que ce sont des chorus taillés pour les stades, des refrains que le public peut scander ensemble, et ça, ça participe à l’énergie véhiculée par l’album !

Johann : Le côté « Pop Metal » est totalement assumé. Ce n’est pas quelque chose qui me dérange : Amaranthe, Beast In Black, Battle Beast sont des groupes que j’écoute régulièrement. Par moments, j’en ai assez qu’on doive toujours prouver à certaines personnes qu’on n’écoute que du Metal… Certains nous boycotteront peut-être si on affirme ce côté ‘’pop’’, mais en fin de compte, c’est ce qui me pousse à continuer à l’assumer ! (Rires) Ça nous amuse !

Quid de ce fameux featuring avec Yannis Papadopoulos (Beast In Black) sur Sex Drugs and Scars ? 

Ça s’est fait au culot ! (Rires) Je ne le connaissais pas du tout avant… En fait, j’avais déjà ce titre, mais je n’étais pas trop satisfait du résultat des démos, il fallait que je change quelques lignes de chant. Il se trouve que Beast In Black a ouvert pour Rhapsody Of Fire dernièrement, et je suis directement allé le voir après sa prestation après leur date parisienne ! Et je lui ai que je lui enverrai un message le lendemain sur Messenger. Je lui ai limite sauté dessus ! (Rires)

Beast In Black semble rencontrer plus de succès que Battle Beast aujourd’hui ! La tendance s’inverse !

C’est sans doute lié à la prestance de Yannis. Il y a vraiment une très belle voix, et les musiques qu’ils composent sont très bien. Ce groupe joue à fond la carte du kitsch, ils n’ont vraiment pas froid aux yeux ! (Rires)… Ils font usage de plein de sonorités… Il y a des sons, des claviers dont on croirait qu’ils sont tout droit sorties des années 80…

Ombeline : Et c’est justement là qu’ils tirent leur épingle du jeu justement. Quand tu fais les choses à moitié, c’est à ce moment-là qu’on te lance des pierres, puis quand tu assumes les choses à fond et que tu es conscient de sortir des titres plus « extravagants », ça marche ! 

Vous êtes désormais chez M & O Music… Spirited Away était sorti via Massacre Records. Pourquoi ne pas avoir continué avec ce label ? 

Johann : Car je n’étais pas du tout satisfait du travail effectué par ce dernier… La promotion française a été faite en bonne et due forme, mais ce n’était pas le cas pour l’international… Le boss du label avait délégué le travail à une autre boîte qui n’a finalement rien fait. Peut-être le label n’était pas assez passionné, je ne sais pas…

« Quand tu assumes les choses à fond et que tu es conscient de sortir des titres plus extravagants, ça marche ! »

Pour l’international, ça va repartir ! Quelques dates en première partie de Demons & Wizards arrivent. C’est une sacrée opportunité pour vous ! Qu’allez-vous jouer ? 

Une bonne partie du nouveau répertoire. On se servira également de ces dates pour présenter le tout nouveau line-up d’Asylum Pyre. Après, puisque nous sommes encore opener, on ne pourra pas jouer autant de morceaux que souhaité… On le fera plutôt à la rentrée prochaine ! En tout cas, c’est une très belle opportunité, oui ! 

On imagine que l’idée est quand même de promouvoir ces nouveaux titres ! 

Ombeline : Oui, mais on continue quand même d’intégrer de vieux morceaux à notre setlist, comme « This Trees » qui commence à s’imposer ! Nous estimons quand même qu’il est important de faire honneur à l’histoire du groupe… Personnellement, j’éprouve un réel plaisir quand j’interprète ces vieux morceaux et que je tends le micro et fais participer les fans !

En ‘’off’’, on a évoqué votre périple jusqu’aux MetalDays. On s’y était croisés sur place l’année dernière… C’est un festival qui vend du rêve. Vous vous étiez produits dans les derniers sur la scène découverte, et les festivaliers étaient usés… 

Johann : Il faut quand même garder le positif de cette aventure. Ça nous a permis de rencontrer de nouvelles personnes, comme notre nouveau bassiste ! (Rires) Après, ça forge. On y est allés, on a assuré notre concert malgré les problèmes qu’on a rencontrés sur place… Et les retours étaient quand même positifs ! Après, je ne cache pas que faire 3000 bornes en deux jours et ne jouer que trente minutes, c’est quand même assez frustrant ! 

Ombeline : Personnellement, je pense qu’on ne remettra pas le couvert avant un moment, en tout cas, pas dans ces conditions-là. Après, j’avoue qu’on nous a offert une belle opportunité… Par moments, avant de se faire connaître, il faut passer dans la case « humilité » et quoi qu’il arrive, ça fait un « plus » dans la carrière du groupe, c’est sûr !

D’ailleurs, est-ce que vous pouvez nous parler de la pochette de N°4. À peine arrivée dans le groupe, Ombeline, c’est toi qui y figures ! 

Ombeline : Il ne faut pas voir que la chanteuse sur la pochette. Il y a quand même une continuité par rapport aux autres pochettes du groupe… Là, nous nous projetons dans un univers post-apocalyptique que nous avons exploré sous différentes facettes et abordons des sujets comme le cynisme, notamment par l’intermédiaire de cette reine de beauté qui doit porter un masque pour respirer, mais qui garde un diadème afin de rester chique… D’ailleurs, on peut mettre le titre de l’album, N°4, en relation avec les gammes proposées par la marque Chanel. Derrière, il y a toute une critique sous-jacente du monde dans lequel nous vivons qui est développée ! 

Est-ce que vous avez écouté le premier EP de Funny Ugly Cute Karma, le nouveau groupe d’Adeline Bellart, l’ancienne chanteuse d’Asylum Pyre ? 

Johann : Je n’ai écouté que deux titres de leur EP, Before It Was Cool, dont la reprise de « Radio/Video » (System Of A Down, ndlr) qu’ils ont faite… Je suis ravi qu’elle ait trouvé sa voie dans ce groupe, elle a l’air de bien s’éclater, et c’est l’essentiel. On leur souhaite vraiment le meilleur. D’ailleurs, le fait qu’elle ne fasse plus partie d’Asylum Pyre ne veut pas forcément dire que nous ne nous entendons plus. De toute façon, je garde contact avec toutes les personnes qui sont passées par la case Asylum Pyre. Il m’arrive régulièrement de prendre de leurs nouvelles… D’ailleurs, l’ancien batteur du groupe doit passer ce soir et il y a quelques jours, j’étais avec l’ancien bassiste… Pareil pour Adeline donc, qui a fêté son anniversaire il n’y a pas très longtemps…


Asylum Pyre, c’est : 

Ombeline « OXY » Duprat : chant

Johann « JAE » Cadot : guitares, chant, programmes

Pierre-Emmanuel « WIK » Pélisson : guitares

Fabien « HED » Mira : Basse

Thomas « KAS » Calegari : Batterie

Discographie

Natural Instinct (2009)

Fifty Years Later (2012)

Spirited Away (2015)

N°4 (2019)

A propos de l'auteur

Rédacteur en chef d'Heretik Magazine

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