C’est précisément le 20 mars prochain que Heaven Shall Burn publiera son neuvième opus… Un album pour le moins ambitieux puisqu’il s’agit là d’un double-album, Of Truth and Sacrifice, aspirant à revisiter tous les styles extrêmes : un exercice Ô combien périlleux qui nous a réservé bien des surprises ! Nous sommes allés le décortiquer avec Maik Weichert, l’un de ses deux guitaristes du groupe, dans le cadre d’une entrevue humaine et pleine de bon sens.

Propos de Maik Weichert (guitare) recueillis par Axl Meu


Vous vous étiez produit en tête d’affiche en juillet 2017 aux Metaldays… Votre show n’avait laissé personne indifférent, du moins, pas moi ! 

Oui ! Les Metaldays est un excellent festival. Je me souviens avoir fait la fête avec Peter Tägtgren qui s’était produit peu avant nous avec Pain. C’était bien chouette de le revoir… Puis, c’est toujours énorme de se produire là-bas, car le paysage est vraiment fantastique ! Les festivaliers prennent soin des lieux, et la nourriture est de qualité. En plus, il y a tous ces petits « plus » comme l’espace « détente » qui font de cet événement un festival spécial !

Parlons à présent de votre neuvième album, Of Truth And Sacrifice. Il me semble que vous avez pris pas moins de quatre années pour le composer et le mettre en boite. Comment expliques-tu cela ? 

En fait, cette fois-ci, nous ne voulions pas nous imposer de quelconque deadline… Tout simplement, car il n’y a rien de plus frustrant de se dire qu’on n’a pas eu tout le temps nécessaire pour enregistrer et peaufiner l’album. Par le passé, il nous est arrivé de suivre des impératifs de sortie, et je dois dire que c’est toujours très stressant… Mais cette fois-ci, on a vraiment pris beaucoup de plaisir au studio en mettre en boite tous ces morceaux. Et le fait d’être libre en temps n’est pas étranger au fait qu’il s’agisse là d’un double-album. Nous avions plus de matière à exploiter ! C’était vraiment une belle expérience, et si c’était à refaire, je re-signerais sans hésitation !

Comme tu l’as mentionné, il s’agit là d’un double-album. Pourquoi ne pas l’avoir fait paraître en deux fois. Une première partie aujourd’hui, une autre dans deux mois ? 

En fait, Of Truth And Sacrifice fait plus ou moins le bilan de ce qu’est Heaven Shall Burn aujourd’hui. En ce moment, beaucoup de groupes ne sortent que des EP, des singles, sur des plateformes comme Spotify, Deezer : ce qui ne me plaît pas des masses ! Je veux dire, j’ai toujours préféré le format physique, et j’ai en mon cœur tous ces fans qui achètent encore des CDs et des vinyles. Donc, nous voulions leur offrir un album copieux qui signe là l’apogée de notre carrière… Et c’est toujours un événement assez particulier dans l’histoire d’un groupe quand celui-ci publie un double-album ! 

Peut-on dire de Of Truth And Sacrifice qu’il est une bonne représentation de ce qu’est Heaven Shall Burn aujourd’hui ? 

Par le biais de cet album, nous voulions offrir à nos fans un beau panel de nos influences et sources d’inspiration. C’est pour cette raison qu’il fait en quelque sorte le tour de tous les styles de musique qui existent dans le champ des musiques extrêmes : du Grindcore, de la PowerViolence, du Death Metal, du Power Metal, et du Metal Classique. Plutôt que de ne se limiter qu’à un seul style de Metal, pourquoi ne pas y inclure un peu de tout dans ce nouvel album : nos influences sont tellement diverses ! On aspirait tout simplement à s’ouvrir, à s’exprimer, sans se demander si les gens allaient aimer, oui ou non. 

N’avez-vous pas trop peur que les fans ne se perdent en écoutant l’album ? N’est-ce pas trop long ? 

Non, pas vraiment. On a surtout hâte de voir la réaction. Peut-être que c’est trop ? Je ne sais pas ! En tout cas, on n’a pas vu les choses comme Devin Townsend qui, lui, peut condenser un tas d’albums dans un et seul morceau. Nous, ce n’est pas trop comme ça… Dans Of Truth And Sacrifice, c’est comme si chaque morceau avait son propre style. Il y a un morceau qui fait plus dans le Power Metal, un autre plus dans le Death Metal suédois, un autre très Death Américain. Il y a même un morceau « à la Manowar » et de Black Metal… Chaque morceau fonctionne selon ses propres règles !

Oui, d’ailleurs, ce morceau « La Résistance » m’a un peu surpris, par ses sonorités très « électro ». Que cette chanson évoque-t-elle en toi ? 

Le but de cette chanson est d’évoquer la furie… Il va droit au but, et avec un tel titre, on se devait de respecter tout ce que connote le mot « Résistance ». Aucun compromis ! À l’époque où une partie du peuple français avait fait obstacle à la barbarie des nazis pendant l’Occupation au cours de la Seconde Guerre mondiale…

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« Les politiques ne sont pas les mieux placer pour s’occuper des problèmes environnementaux. » 

Il y a un titre bien engagé dans l’album : c’est « My Heart And The Ocean », c’est sans doute son morceau le plus important. Vous y dénoncez la pollution, le réchauffement climatique et surtout la surpêche… En quoi pouvons-nous dire que la popularité du groupe vous aide à porter vos idées ? 

Bien sûr, les thématiques sont classiques, c’est vrai. Ça parle bien sûr du réchauffement climatique et tout ce qui a un rapport avec l’environnement. Ça fait presque vingt années que nous soutenons l’association Sea Shepherd… Et ce n’est pas prêt de s’arrêter là ! Ça fait partie de nos convictions, et je sens qu’il est également de notre devoir de soutenir les causes qu’elle défend. Je veux dire… Si la popularité du groupe peut faire éveiller les consciences, c’est toujours ça de pris ! Beaucoup ne sont pas pleinement avertis de tout ce qui se passe en ce moment dans les océans… Tous ces traités de pêche qui sont bafoués par les grossistes et les multi-nationales… Bien sûr, tout ça, ça se passe bien loin de nos yeux, donc, on a du mal à s’en rendre compte… Et je me doute qu’il est difficile concevoir l’idée que, s’il n’y a plus de formes de vie dans les océans, ça conduira fatalement à l’extinction de la race humaine. Pourtant, c’est ce qui risque d’arriver… Donc, il est de notre devoir de déclencher la sonnette d’alarme. 

Est-ce que tu penses que les mentalités sont appelés à évoluer, malgré l’obstination des leaders d’extrême droite, notamment Donald Trump et Bolsonaro. 

J’ai bien peur que non… Et le temps que politiciens évaluent l’ampleur des dégâts, il sera hélas trop tard pour changer quoi que ce soit. Par moments, ces derniers font semblant d’être investis dans la cause, émettent des solutions toute simples, et tout ça, ça leur permet d’être élu et ainsi d’avoir le pouvoir. Malheureusement, ils préfèrent récupérer des voix, ils ont tellement de soif de pouvoir qu’ils feignent s’intéresser aux vrais problèmes. Une fois élus, ils émettront des solutions bidons qui ne marcheront pas, mais on continuera de les élire. Les politiques ne sont pas les mieux placés pour s’occuper des problèmes environnementaux. 

La jeune génération portée par Greta Thunberg peut-elle y changer quelque chose selon toi ? 

Il est clair que Greta Thunberg fera bien plus que tout ce que Donald Trump n’a pu entreprendre jusqu’à aujourd’hui. Quoi qu’il arrive, il ne veut rien changer… Greta sait qu’elle ne pourra pas faire grand chose, mais son message a le mérite d’être clair : elle a surtout appelé les hommes politiques à faire confiance aux scientifiques, tous ceux qui ont le savoir à leur portée pour faire avancer les choses. Rien que pour ça, elle n’a pas tort ! Pourquoi Trump n’écoute-t-il pas les scientifiques ? C’est quand même dingue qu’une jeune fille de 16 ans ait plus foi en la science qu’un vieil homme. 

Sur l’album, il y a quelques guests : Chris Harm de chez Lord Of The Lost, Matthi de chez Nasty et Andreas Dörner de chez Caliban. Sur quel morceau apparaissent-ils ? 

Andreas Dörner fait une apparition sur la chanson « Terminate The Unconcern »… Cette chanson parle d’un nos fans, décédé des suites d’un cancer. C’est une histoire tragique… C’était pour lui rendre hommage, lui, qui était à la fois fan de Heaven Shall Burn et de Caliban… Pour ce qui de Matthi de Nasty, il chante sur notre reprise de Nuclear Assault, « Critical Mass », il nous fallait quelqu’un capable de pousser des vocalises plutôt typées « Hardcore ». Il a fait le job ! Enfin, Chris est sur le morceau « The Sorrow Of Victory », le morceau dont je te parlais tout à l’heure, très « Manowar » dans l’âme. Chris est celui qui a une voix très « gothique », un peu à la Type O Negative.

Pourquoi avoir repris cette chanson de Nuclear Assault ?

On adore ce groupe ! Ce groupe de Thrash a ce côté Hardcore qui tâche bien ! Puis, « Critical Mass » parle d’environnement… Ces mecs sont des précurseurs ! Beaucoup se sont fait à l’idée qu’il n’y avait que les groupes d’aujourd’hui qui parlaient d’environnement dans leurs textes, alors que non. Cette reprise, c’est notre façon de montrer que nous ne sommes pas les premiers à placer la problématique environnementale au centre de son discours ! 

Ce nouvel album est accompagné d’un documentaire : « Mein grünes Herz in dunklen Zeiten ». Est-ce que tu peux m’apporter quelques éléments d’information à son sujet ? 

Ce documentaire – qui a d’ailleurs été diffusé dans les cinémas allemands dernièrement – rend compte non seulement de l’élaboration du nouvel album d’Heaven Shall Burn, mais aussi de notre vie à côté du groupe. Il montre quel type de personne nous sommes au quotidien, c’est-à-dire, des gens simples qui ont un travail à temps plein à côté pour subvenir à ses besoins… On sait que l’on pourrait vivre facilement de notre musique aujourd’hui, mais on préfère garder la tête froide, avoir un job, et se comporter comme « monsieur tout le monde ». D’ailleurs, à titre personnel, je suis avocat et j’enseigne le droit à l’université ! 

Cet été, nous vous verrons au Hellfest. Que nous réservez-vous ? 

On est actuellement en train de plancher sur nos prochaines dates ! On n’est pas du genre à se contenter d’un simple backdrop. Il y aura d’autres animations visuelles… On verra ! Ça va faire deux ans que nous n’avons pas foulé la scène, et autant te dire que nous avons hâte ! Ça sera le feu au Hellfest, ça, je peux te le garantir !


Heaven Shall Burn, c’est : 

Maik Weichert : Guitare

Alexander Dietz : Guitare

Marcus Bischoff : Chant 

Eric Bischoff : Basse

Christian Bass : Batterie

Discographie : 

Asunder  (2000) 

Whatever It May Take (2002) 

Antigone (2004) 

Deaf to Our Prayers (2006)

Iconoclast  (2008)  

Invictus  (2010)

Veto  (2013) 

Wanderer (2016) 

Of Truth and Sacrifice (2020) 

A propos de l'auteur

Rédacteur en chef d'Heretik Magazine

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