Adam Darski, plus connu sous le nom de Nergal, a beau être l’un des représentants les plus populaires de la scène Black Metal européenne, cela ne l’empêche pas de sortir de sa zone de confort en évoluant depuis 2017 au sein d’une formation de Country/Blues : Me And That Man, son side-project. En 2020, il nous publie New Man, New Songs, Same Shit, Vol. 1, un album particulièrement ambitieux, sur lequel ont trouvé leur place un paquet d’invités de marque.

Propos d’Adam Darki AKA Nergal (chant/guitare) recueillis par Axl Meu


Comment te sens-tu malgré l’actualité morose à laquelle le monde doit faire face en ce moment ? 

Nous traversons une époque très particulière. Comme tout le monde, je suis chez moi, confiné. Il faut rester fort, trouver de quoi s’occuper. Mais, on sortira, quoi qu’il en soit, grandis de cette épreuve. 

Avant qu’on ne parle à nouveau de Me And That Man, Behemoth était parti en tournée avec Slipknot en janvier/février dernier. Quel effet ça fait de remplir toutes ces grandes salles ? 

C’était un peu le point d’orgue de notre carrière pour nous qui tournons depuis près de 30 ans. Nul doute qu’il y a eu « un avant » et qu’il y aura « un après » cette tournée. Nous avons adoré tourner avec Slipknot, ce sont de bons amis… Le public était au rendez-vous, les salles, pleines à craquer. Sur le plan personnel, j’espère que nous sommes parvenus à convertir le maximum de monde. Bref, nous avons du profiter comme il se doit de cette belle tournée qui, avouons-le, était une belle opportunité d’élargir notre public.  

Est-ce que tu peux revenir sur la raison pour laquelle tu as décidé de lancer Me And That Man en 2017 ? C’est quand même un projet sensiblement différent de ce à quoi tu nous as habitués avec Behemoth…

Ce projet résulte d’un besoin que j’avais… Le lancer, c’était une façon pour moi de maintenir un certain équilibre entre mon penchant pour les musiques extrêmes et les musiques plus Rock. C’est un peu comme cela que je conçois les choses, Me And That Man m’aide à canaliser mon énergie, à trouver un équilibre, à faire la part des choses… Les fans ne se rendent pas toujours compte que le fait d’être impliqué dans une formation comme Behemoth requiert beaucoup de temps et d’énergie. Cela dit, quand je m’occupe de Me And That Man, Behemoth me manque et quand j’évolue au sein de Behemoth, les choses simples me manquent également cruellement, comme celle de composer des morceaux simples. 

Me And That Man est-il un bon moyen pour toi de te reposer ? 

Pas vraiment, non. Avec ce projet, je bosse autant, mais différemment. D’ailleurs, j’ai déjà quelques idées pour le prochain album au moment où nous sommes en train de nous parler. Je suis toujours inspiré, je travaille, me questionne toujours, mais je ne procède pas de la même façon pour les deux groupes. C’est différent. 

Ce deuxième album s’intitule donc New Man, New Songs, Same Shit, Vol. 1. C’est un opus particulier car tu y as invité un nombre intéressant de personnalités du milieu, parmi eux, Corey Taylor (Slipknot, Stone Sour), Ihsahn (Emperor), Johanna Sadonis (Lucifer), Matt Heafy (Trivium) et même Niklas Kvarfoth (Shining)…

Cette fois-ci, j’ai vraiment ressenti le besoin de redéfinir le concept de Me And That Men et proposer quelque chose de différent par rapport à Songs Of Love and Death, histoire de me surprendre moi-même, mais aussi de vous surprendre, vous. D’ailleurs, c’est aussi pour cette raison que j’ai décidé de ne chanter que sur une seule chanson (« Mestwo », ndlr) et de laisser les autres s’occuper du reste. Je reste à la tête du projet, il a d’ailleurs tellement évolué depuis son premier album. En tout cas, je tenais à ce que ce nouvel album soit le fruit d’un effort collectif, et c’est bien le cas ! 

Comment as-tu sélectionné tous ces invités ? Plutôt par affinité ou selon les qualités de chanteurs/euses des concernés ? 

Eh bien, l’idée était quand même d’inviter des amis à moi. Mais il a également fallu que j’aille au-delà de la simple amitié et que je les sélectionne pour leurs propres talents qui, tu t’en doutes sans doute, sont différents les uns des autres. Ils ont tous très talentueux, et je savais bien qu’ils sauraient apporter quelque chose de nouveau, installer un vent de fraîcheur à tous mes morceaux, de nouvelles saveurs en quelque sorte. En tout cas, ils sont tous des meilleurs chanteurs que je ne le suis, donc ça me va très bien ! 

Une fois encore, Me And That Man délivre une sorte de Blues/Country à consonances Black. Est-ce difficile pour toi d’évoluer dans un tel registre, surtout que la Pologne n’est pas réputée pour sa scène Blues…

Eh bien, ça fait un moment que je suis attiré par ce style de musique. Et je prends beaucoup de plaisir à m’essayer dans ce domaine, mais je ne pourrais jamais prétendre y être attaché depuis ma tendre enfance. Comme tu dis, la Pologne n’entretient aucun rapport avec la scène Blues/Country Américaine. Nous, c’était bien différent, j’ai été élevé avec la musique traditionnelle polonaise, bien ennuyante d’ailleurs ! Ce n’est que par la suite que j’ai pu m’intéresser à la scène britannique et américaine et tout ce qui s’y faisait. 

« Quand j’évolue au sein de Behemoth, les choses simples me manquent cruellement »

Le dernier morceau de l’opus, c’est « Confession » et c’est Niklas de Shining qui officie au sein de chanteur. Je dois t’avouer que le morceau m’a surpris. Il est découpé en deux parties, la deuxième étant caractérisée par ses blast-beat. Est-ce que c’est une manière pour toi de renouveler ce style ? 

La fin de cette chanson est vraiment venue de manière très spontanée. En fait, nous étions au studio, la chanson devait s’arrêter au bout de deux minutes, sans les parties de blast/beat, mais finalement, une sorte de battement est venue se coller sur la piste un peu par hasard. Ce n’était pas du tout prévu. Je me suis rendu compte que ça collait plutôt bien, d’où l’idée d’allonger le morceau. Finalement, je suis arrivé avec cette chanson, un peu dingue, surprenante, imprévisible, qui sort de l’ordinaire. En fait, après réflexion, je me suis dit que ça serait une très belle façon de mettre un terme à l’album et je suis sûr que chacun sera très surpris quand ils verront où ce morceau nous mène. 

Connaissant le tempérament trempé de Niklas, était-ce facile de le faire participer à une telle entreprise ?

Ça va ! Il était très motivé par l’idée de faire partie de l’album. Pas que lui, les autres aussi d’ailleurs. Ceux qui étaient moins enthousiastes ont quand même joué le jeu pour voir ce que ça donnerait. Et finalement, tous sont repartis avec un morceau dont ils sont tous fiers !

Ce nouvel album s’intitule New Man, New Songs, Same Shit, Vol. 1. Est-ce que cela signifie qu’une deuxième partie est prévue pour l’année prochaine ? 

Bingo ! (Rires) Je ne suis pas sûr qu’il sortira l’année prochaine mais j’ai déjà quelques idées en tête et des invités, déjà dans les starting-blocks, pour monter cette fameuse deuxième partie. En tout cas, oui, c’est prévu !

En quoi peut-on dire que ce projet a eu un impact sur ta manière de sonner au sein de Behemoth ? Beaucoup se sont accordés pour dire que le dernier album de Behemoth, I Loved You At Your Darkest, sonnait différemment. Est-ce que tu penses que c’est lié à ton implication au sein de Me And That Man ? 

J’espère ! J’espère sincèrement que ça affectera le son de Behemoth, que ça m’inspirera, mais d’une autre façon. En tout cas, ça a un effet sur mon état d’esprit, je me sens comme différent… Donc, quand je dois me replonger dans Behemoth, c’est comme si j’étais un autre homme, frais à nouveau, donc c’est cool d’avoir cette dynamique. En tout cas, la musique de Behemoth n’a pas forcément besoin d’être si intense, elle peut être aussi plus Rock, et pour tout t’avouer, ça me va très bien : je ne souhaite pas écrire encore et encore le même album ! 

Aujourd’hui, tous tes concerts, non seulement ceux de Me And That Man, mais aussi ceux de Behemoth sont soit annulés soit repoussés à cause du COVID-19. Comment perçois-tu cela ? 

Eh bien, aujourd’hui, je garde espoir qu’une poignée de festivals sera maintenu, notamment le Hellfest où je dois me produire avec Me And That Man, une fois que l’épidémie sera derrière nous. Je sais également que l’on doit se produire au Motocultor avec Behemoth… Ça serait dommage que tout soit annulé. Surtout que j’entretiens des rapports particuliers avec la France. Toujours, nous avons été traités comme des rois chez vous ! En tout cas, j’espère qu’on parviendra à botter le cul à ce pt*** de virus dans les plus brefs délais ! Dans le pire des cas, si devons annuler nos concerts, je vous promets que l’on vous en donnera le double, aussi bien avec Behemoth ou Me And That Man.

Sur les réseaux sociaux, tu t’es dernièrement moqué de toutes les personnes qui te critiquais, car tu es à la fois une personnalité publique et un des représentants les plus importants de la scène Black Metal. Pourquoi est-ce si important pour toi d’utiliser les réseaux sociaux pour t’exprimer ? 

Je n’utilise qu’Instagram… Je n’aime pas trop Facebook, je trouve ça d’un ennui… Après, via Instagram, j’y trouve plus d’authenticité. Sur cette plateforme, je m’occupe principalement des postes et tu peux sentir que tu t’adresses à la vraie personne. Tu sais qui est derrière le contenu… Ce n’est pas comme Facebook où un community-manager s’occupe des postes de ta page uniquement pour la faire grossir. En tout cas, j’essaie d’être honnête, de rester authentique et, oui, il arrive que l’on me fasse de sales remarques, mais je n’en ai strictement rien à faire. Je reste moi-même quoi qu’il arrive. 

Ma dernière question sera la suivante : comment doit-on écouter ce nouvel album de Me And That Man ? 

Eh bien, ce qui est cool avec ce nouvel album et Me And That Man, c’est qu’à l’inverse de Behemoth pour qui les sonorités sont complexes, tu peux écouter Me And That Man quand tu veux, en toutes circonstances, en soirée par exemple. Tu peux vraiment passer les morceaux quand tu veux, surtout les sujets qu’ils développent dans l’opus sont vraiment simples. 


Me And That Man, c’est : 

Adam Darski (Nergal) : chant, guitare

+ musiciens session

Discographie : 

Songs Of Love And Death (2017)

New Man, New Songs, Same Shit, Vol. 1 (2020)

A propos de l'auteur

Rédacteur en chef d'Heretik Magazine

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