Mêler littérature et musique, le pari est audacieux. En effet, Bonbon Noir – comprenant en ses rangs des ressortissants de Flying Pooh – ne fait rien comme les autres. La sortie de son premier album, And So Be It Anita, sera accompagné d’un roman retraçant l’itinéraire de son héroine, Anita, que son géniteur, L. Erwan Kern, nous a présentée tout dernièrement !
Propos de L. Erwan Kern recueillis par Axl Meu
Bonbon Noir est une formation née sur les cendres d’une autre, Flying Pooh…
C’est assez simple, en 2015, à peine notre tournée arrivée à son terme, notre clavier nous annonce son départ. Quelques semaines après, c’était au tour de notre bassiste – qui était là depuis le début – de partir. On se retrouve alors à quatre, alors le groupe avait déjà compté douze membres par le passé ! Alors, il a fallu se remettre en question et je ne voulais pas refaire encore et encore la même chose avec Flying Pooh… Et entretemps, j’avais commencé à écrire un petit scénario – une petite nouvelle – mettant en scène le personnage féminin d’Anita Black, et je voulais en créer la bande originale et sortir du schéma « refrain/couplet/refrain ». Donc, il a donc fallu s’organiser. N’ayant plus de clavier, Rek, alors compositeur principal de Flying Pooh, décide de s’y mettre… À côté, il monte même son propre studio d’enregistrement. Puis, je rencontre une éditrice intéressée par l’idée de publier mon écrit. C’est à ce moment que la machine s’est emballé ! Rek avait désormais son studio, ce qui fait qu’on avait désormais tout le temps à notre disposition pour mettre au point nos morceaux. Aussi, je continuais d’écrire et de rencontrer des illustrateurs, intéressés par le projet.
Notre objectif au sein de Bonbon Noir est de proposer un univers complexe, riche, intéressant et précieux. Pour ça, il nous a fallu mettre le paquet sur les finitions pour que l’objet soit le plus beau possible ! Ça va faire cinq ans que je travaille nuits et jours dessus… Et finalement, on arrive enfin avec ce premier fragment qu’est le vinyle, ainsi que le roman et les sérigraphies qui vont avec !
Comment as-tu travaillé à la fois sur la musique et le texte ? Aussi, comment avez-vous fait pour transposer au mieux – musicalement – les ambiances qui se dégageaient du roman ?
En même temps, parallèlement. En fait, ce n’est pas un roman : « Tu tournes la page, et tu écoutes le morceau qui suit ». C’est vraiment un ensemble d’ambiances, un tout ! Pour ce qui est des compositions, il m’arrivait de lire des passages aux gars, et ça les inspirait. Par moments, il suffisait d’une seule lecture à Rek pour que celui-ci arrive avec un tas d’idées cohérentes. Après, il faut dire que ça fait un moment que nous nous connaissons, même si il arrive encore que nous nous disputions ! (Rires) Certes, je ne suis pas très patient comme gars, mais, finalement, ça a été, on est arrivé à la fin du processus ! Là, le LP arrive le 25 juin avec le livre. Nous prévoyons aussi de sortir la suite à la fin de l’année : un peu plus Rock pour le coup !
Tu vas devoir écrire un nouveau roman, donc…
Oui, je me étais déjà penché sur la suite un peu avant le bouclage du premier tome. C’est vraiment un processus sans fin, avec les corrections et tout ce qui s’en suit. Et moi-même, j’ai du mal à me dire que je suis désormais « auteur de roman ». La première fois qu’on m’a fait la remarque, ça m’a fait tout drôle ! (Rires) Après, il faut savoir que créer des scénarios, se renseigner pour éviter les anachronismes, c’est vraiment beaucoup de travail. Cela dit, à l’inverse des films où tu as un budget et une deadline, quand tu bosses sur un roman, tu es libre : tu n’as besoin que de ta plume et de ton imagination. Mais le plus dur restait la relecture. Au fil des mois, il est arrivé que mon relecteur me fasse redécouvrir des passages de mon roman que j’avais oubliés ! (Rires)
Ce premier roman est donc accompagné d’un premier LP, And So Be It Anita. Est-ce que tu peux revenir sur l’itinéraire de cette jeune fille ?
Anita a vu le jour en 1920 à New York. Sa mère est française, créatrice de bijoux, et son père, Irlandais, porté sur les grands alcools, les grands vins et la littérature française. Autant dire qu’elle a une existence fantastique jusqu’à la fin des années 20. 1929, l’atelier de sa mère prend feu, puis elle se retrouve à la rue avec elle, sans rien. L’angoisse, quoi. Rapidement, elle perd sa mère à 12 ans, ce qui lance d’emblée la deuxième partie de sa vie désormais qu’elle est orpheline. Elle doit donc se battre pour survivre, et naturellement, on va lui faire voir certaines choses qu’une jeune fille de son âge ne devrait pas voir. Tout ça va lui forger un fort caractère qui va la motiver à retrouver sa liberté, sa volonté de vivre librement.

« Notre musique sort des sentiers battus, tu n’y retrouveras pas les normes « FM » des morceaux qui passent à la radio »
Pour ce qui est de la musique, on peut dire qu’il s’agit d’une bande originale psychédélique avec un côté étouffant par moments. Quand tu écoutes la musique et que tu connais la musique, automatiquement, tu vois les choses autrement. On y retrouve un petit côté à la David Lynch dans certains morceaux… Mais pas que. And So Be It Anita contient sa dose de mesures psychédéliques, notamment sur le premier single que nous avons sorti, « An Absolute Beginner », qui évoque de manière très cinématographique la vie d’un professeur écossais loufoque et cocaïnomane.
Sur And So Be It Anita, on y retrouve quelques guests et featurings (Lady Damiot, J.E Queen…)…
Oui, puisque cette histoire met en avant un personnage féminin, Anita Black, il me semblait normal de faire appel à des intervenantes. Il n’était pas concevable que je sois le seul à chanter, alors que le personnage principal est une femme. D’ailleurs, je pense que j’accorderai plus de place aux chants féminins dans le prochain opus. C’est amusant parce que, lorsque j’ai fait lire mes écrits à certaines de mes amies, elles n’ont pas su deviner que j’en étais l’auteur. Elles m’ont toutes dit que mon roman avait une portée presque féministe et que son auteur était une femme… mais, moi, à titre personnel, je ne suis qu’un humaniste. Mais peut-être que le fait qu’une femme soit en centre de l’action en fait un roman féministe. Je ne sais pas. En tout cas, je suis toujours à la recherche d’illustratrices pour compléter l’équipe. J’en trouverai bien une, c’est sûr !
Les parties narrées de « Bullrock Island » développent des revendications féministes…
Oui, c’est ça, mais c’est plutôt un message positif, puisqu’elles correspondent à une sorte de libération. Anita se tire des États-Unis et s’envole pour le « Bullrock Island », une île déserte irlandaise et forme avec des amies à elle, son club.
Du fait de son caractère psychédélique, dirais-tu que la musique de Bonbon Noir est libre ?
La question ! (Rires) En tout cas, je ne sais pas trop… On a composé les morceaux à quatre, à partir de les idées de Rek qui, lui, est un fan de musique au sens large du terme, tous styles confondus. Après, il est vrai que notre musique sort des sentiers battus, tu n’y retrouveras pas les normes « FM » des morceaux qui passent à la radio. Peut-être que l’on pourrait les passer la nuit ? Je ne sais pas !
Ton projet à long terme est de monter un film consacré à la vie d’Anita. Comment comptes-tu procéder pour la suite, notamment pour les concerts ?
En fait, pour le moment, il y a déjà le livre qui sort, pareil pour l’album… Et ensuite, nous allons travailler sur un podcast. Pour ce qui est du film, on a essayé de collaborer avec une voix connue. Pour le deuxième vinyle que nous comptons sortir à la fin de l’année, nous partons sur un objet encore plus délirant. Pour ce qui est du « live », ce n’est pas encore à l’ordre du jour ! Si ça doit se faire, on ne se contentera pas d’un simple concert comme on faisait avec les Flying Pooh. On mettra l’accent sur la vidéo, sur les lumières, un peu feutrées… Et ça prend du temps !
And So Be It Anita sortira le 25 juin prochain via Pamelah Pooh Records, votre propre label.
Oui, c’est un label que nous avons fondé pour trouver des subventions et avoir un lieu administratif. Avec les Flying Pooh, nous n’aimions pas trop nous occuper des affaires purement administratives… Quand on était travaillaient avec des labels, ça se finissait toujours mal. Désormais, nous gérons notre propre structure, ce qui nous rend libres ! Certes, on paie ça au prix fort, mais bon, le fait de gérer tout par nous-mêmes est bien plus gratifiant… Tu sais, communiquer sur les réseaux sociaux, coller les affiches, imaginer les visuels… Il faut tout faire, et à la fin, c’est un peu comme si c’était mon deuxième job !
Bonbon Noir, c’est :
Sat : chant
Dave : basse
Rek : guitares, claviers, orgue
Matt : batterie, percussions, choeurs
Discographie :
Bonbon Noir (2020)
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