Petit tour du côté des Alpes en compagnie de Trank, formation de Post-Rock alternative ambitieuse à l’origine d’un tout premier album, The Ropes, un album qui – espérons-le – lui ouvrira bien des portes. En attendant la fin de l’épidémie et la reprise des concerts, elle était de passage au Black Dog, à Paris, pour une session d’interviews en face-2-face. À l’ancienne ! 

Propos de Yohan (batterie) recueillis par Axl Meu


Est-ce que tu peux nous présenter Trank ? C’est un groupe français, suisse ? 

Yohan (batterie) : On est tous les quatre français, issus de diverses régions, mais pour des raisons professionnelles, on s’est tous retrouvés sur Genève… En fait, il faut savoir que Julien est à l’initiative de la formation du groupe. Il avait déjà un paquet de compositions et cherchait un groupe. Donc, après avoir passé quelques annonces, il est amené à faire la rencontre de Michel, notre chanteur. Ce n’est que par la suite qu’ils se sont mis en quête d’un batteur et d’un bassiste… Moi, en ce qui me concerne, je connaissais déjà Michel depuis une paire d’années pour avoir bossé avec lui dans une autre vie. Donc, il m’a proposé de venir, et moi-même, j’avoue avoir eu un coup de cœur pour ses compositions. Après, je dois t’avouer que nous avons eu du mal à trouver un bassiste qui nous aille. Mais finalement, nous avons trouvé David. On a commencé à répéter ensemble courant 2017, et c’est vraiment à ce moment-là qu’il y a eu un déclic. On avait désormais tous les ingrédients pour donner vie à ces morceaux et en composer plein d’autres. 

Vous avez préféré donner un paquet de dates en premier, puis enregistrer ce premier album, The Ropes, que vous nous présentez aujourd’hui…

En fait, le groupe avait déjà publié un premier EP en 2016. J’ai rejoint le groupe en août 2015 et on était allé l’enregistrer en décembre dans la foulée. C’est allé très très vite ! Donc, on l’a diffusé à droite, à gauche… Quand David nous a rejoints en 2017, nous avons enregistré 2/3 morceaux en mode « single » pour mettre à jour notre actualité. Et c’est grâce à ces trois titres qu’on a été amenés à assurer les premières parties d’AnthraxPapa RoachDisturbed et Deep Purple… Et nous produire avec ces groupes-là, ça nous a fait réaliser à quel point nos chansons fonctionnaient bien sur de grosses scènes. Aussi, ça nous a aussi permis de prendre du recul sur notre manière de concevoir la musique. C’est pour cette raison que nous avons passé beaucoup de temps à mixer l’album. D’ailleurs, pour avoir le meilleur rendu possible, nous nous sommes entourés de Brian Robbins (Asking Alexandria, Bring Me The Horizon, ndlr). Il est parvenu à donner beaucoup de puissance à notre musique, sans pour autant la dénaturer. Bon, COVID-19 oblige, la phase de mixage aura pris beaucoup plus de temps que prévu, mais l’attente en a valu la peine. Pour la partie mastering, là, nous avons fait appel à une autre pointure du genre, Andy VanDette, connu pour son travail auprès de légendes du Prog comme Rush et Porcupine Tree… 

Tout à l’heure, tu m’expliquais que Julien était à l’origine des premiers morceaux du groupe. Quid des nouvelles compositions de ce The Ropes ? Y a-t-il eu du changement sur le plan de la composition ? 

C’est assez intéressant, car 80% des morceaux ont soit été composés par Julien, soit par David. Au départ, il est vrai que c’était Julien qui s’occupait de la majorité des compositions, mais ça a changé. Les 20% restant ? Ils ont été composés par Michel. Lui, il s’est occupé du chant, des sections clavier et séquenceurs. Cela dit, il y a vraiment eu concertation… Nous nous sommes posés et avons évoqué la question des arrangements ensemble. Donc, on peut dire qu’il y a un point de départ, Michael, David, Julien, puis un travail à quatre pour en tirer le meilleur ! 

Concernant la musique de Trank, elle reste très atmosphérique, très ambiante, ce qui ne l’empêche pas d’être dynamique. À quel type de groupes vouliez-vous ressembler ? 

C’est une bonne question… À vrai dire, ça fait quatre ans qu’on se la pose. Mais pour être honnête, on n’a jamais trouvé de réponse qui nous convienne parfaitement. Donc, pour faire simple, nous disons tout simplement que nous jouons les morceaux que nous aimerions écouter si nous en étions les auditeurs. Et cette musique-là, elle est le fruit de nos influences à nous quatre. En termes de groupes, on aura tendance à penser à MuseAlter BridgeDepeche Mode aussi. Il y a vraiment de tout, mais, on ne se dit jamais : « Voilà, j’ai envie de faire ça »… On commence plutôt par une mélodie, on étudie dans quelle direction elle peut nous amener, puis on travaille sur l’atmosphère globale. 

À l’écoute de l’album, on peut également y ressentir une certaine mélancolie. Comment expliques-tu cela ? 

C’est probablement dû au fait que nous avons tous entre 37 et 44 ans au sein du groupe… On n’a plus 20 ans ! Nous ne sommes pas vraiment mélancoliques, ni nostalgiques… En effet, certains de nos riffs sont assez noirs, mais il n’est pas improbable que d’autres de nos idées vous fassent danser ! En tout cas, nous ne voulons pas que les auditeurs soient déprimés à l’écoute de notre musique, bien que les sujets abordés ne soient pas très gais… Pour ce qui est des paroles, nous observons le monde qui nous entoure et parlons des sujets qui fâchent… Après, nous sommes conscients que nous n’allons pas changer la face du monde avec notre musique, mais bon, on dit toujours : « On ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments ». C’est un peu pareil ici.

crédit photo : Emilie Deville

« Nous jouons les morceaux que nous aimerions écouter si nous en étions les auditeurs »

De quoi parlent les chansons « Refugee » ? Qu’en est-il de « Troubled Times » et de « The Ropes » ? 

Pour « Refugee », c’est un morceau purement instrumental… Mais dans ce morceau, on utilise des « samplers » qui mixent des documents datant des 70’s portant sur le « Bone People » et un autre portant datant des 2010’s portant lui sur les réfugiées qui se déplacent par le biais de navires de fortune… Et en fait, ça nous a permis de nous rendre compte que les choses n’avaient pas beaucoup changé en 40 / 50 ans… Ça fait quarante ans qu’on a le même problème, et il n’est toujours pas réglé ! Concernant « Troubled Times », il parle des prêtres évangélistes qui vont prêcher la soit-disante bonne parole à qui le veut. Les gens dans le public savent très bien qu’on leur raconte n’importe quoi, mais ça ne les empêche pas de boire leurs paroles… Enfin, pour « The Ropes », ça parle des gens qui se font manipuler, qui sont comme des marionnettes… Finalement, on y a établi plusieurs réflexions. La personne qui voudrait délivrer ces personnes ne serait-elle pas en train de les manipuler à son tour ? Donc, dans nos chansons, il y a toujours ce rapport « dominant / dominé ». 

« The Ropes » va faire l’objet d’un clip très prochainement. Il me semble qu’il sera très visuel. Quel était le projet ? 

Oui, alors, comme je disais à l’instant. Le titre porte sur la manipulation, et justement, on y fait l’analogie avec l’usage des cordes et tout ce dont je te parlais tout à l’heure, l’idée de se faire manipuler encore et encore… Ce pourquoi il est chanté de ce morceau « I will show you the ropes » à comprendre comme « je vais te montrer l’envers du décor ». Pour mettre en images cette réflexion, nous avons fait l’usage du « shibari », l’art du « bondage » à la Japonaise. Ça nous a permis d’illustrer ce fameux rapport de force… De montrer des gens qui se font ligoter tout en développant une dimension spirituelle. Et ça nous permet de ne pas tomber dans le cliché du SM et développer plusieurs contrastes. 

En première partie d’interview, tu disais que tu étais aussi le manager du groupe. Ça fait quoi d’être à la fois le manager et le batteur d’un groupe ? 

Ça fait qu’on dort peu ! (Rires) En fait, quand je dit « manager », il faut savoir que je m’occupe « grosso-modo » d’une partie de la communication. Après, nous avons tous différents rôles au sein du groupe, en plus de notre rôle de musicien. On se sert de nos compétences… Julien, par exemple, à côté des guitares, il s’occupe plus ou moins de la partie « visuelle », lui qui est passionné par la vidéo. Michel s’occupe lui de la section administrative. Donc, voilà, on se répartit les tâches en fonction de ce que l’on sait faire le mieux. Pour ma part, je m’occupe de la partie logistique des concerts… 

C’est donc grâce à toi si le groupe a pu se produire aux côtés de Disturbed, Anthrax et Papa Roach…

Non, non, c’est grâce à nous quatre ! (Rires) En fait, après constat, nous avons réalisé que beaucoup de gros groupes n’avaient pas de première partie, notamment en Europe de l’Est. Ce pourquoi nous avons démarché des promoteurs de ces régions-là… Et parmi eux, il y en a un qui a vraiment accroché à notre musique et qui a commencé par nous proposer d’ouvrir pour Prophets Of Rage en Russie. Rien que ça ! Finalement, les deux concerts n’ont pas pu avoir lieu parce que le groupe n’a pas vendu assez de tickets, la faute de la Coupe du Monde de Football (2018). La poisse ! Mais ce même promoteur est revenu vers nous pour nous proposer d’ouvrir pour Deep Purple (Sourire téléphonique)… Et là, on se retrouve à jouer pour eux à Riga devant 15. 000 personnes ! Et fil en aiguille, on nous a proposé d’autres bons plans…

Pour promouvoir un album, il faut des dates, se produire… Ce qui semble être compliqué aujourd’hui…

Pour l’instant, nous avons une date de prévue, qui est en fait notre « release-party ». Si tout va bien, elle devrait avoir lieu le 7 novembre prochain au CCO de Villeurbanne. En fait, cette soirée sera une triple « release-party » que l’on assurera avec nos amis de Perseide et de SWC… En tout cas, c’est le seul événement sur lequel on met de la visibilité. Ensuite, ça va être comme tout le monde… On attend que tous les voyants passent au vert pour reprendre. 


Trank, c’est : 

Julien : Guitare 

Michel : Chant 

David : Basse 

Yohan : Batterie 

Discographie : 

Trank (EP-2016)

The Ropes (2020)

A propos de l'auteur

Rédacteur en chef d'Heretik Magazine

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