On connait DevilDriver pour son rythme de vie effréné : albums, tournées, album, tournées, et ainsi de suite. Mais clairement, en ce moment, crise sanitaire oblige, qui aimerait être à la place de Dez Fafara qui a vu tous ses projets tomber à l’eau ? Et pourtant, ça ne l’a pas empêché de nous parler avec enthousiasme de la première partie du premier double-album de l’histoire de DevilDriver – Dealing With Demons – que la formation prévoit de sortir en deux étapes.

Propos de Dez Fafara (chant) recueillis par Axl Meu


Tu es revenu avec un nouvel album, la première partie de Dealing With Demons. Pourquoi avoir décidé de sortir ce double-album en deux temps ?

C’était tout nouveau pour moi ! Jamais encore, il ne m’était venu à l’esprit de sortir un double-album. J’avais tout simplement envie de m’exprimer et de faire face à certains de mes démons. Aussi, il me tenait à cœur que nos nouvelles compositions soient amène d’engager des débats chez les gens qui nous écoutent. Et pour arriver à mes fins, j’avais besoin d’un double-album. Au départ, mon projet était aussi d’enchaîner les sorties d’albums pour tourner pendant trois ans d’affilée, puis prendre quelques vacances… Mais finalement, à cause de la COVID-19, tous mes projets sont tombés à l’eau… Ça commence sérieusement à faire long là.

Comme tu me dis, cet album tourne donc autour de tes propres démons, tes problèmes d’anxiété. Peut-on considérer ce Dealing With Demons comme une sorte d’autobiographie ? 

Je pense que l’on peut dire ça, oui. Mais je pense aussi que ce nouvel album est le point d’ancrage d’une nouvelle ère pour DevilDriver. En fait, ici, en composant Dealing With Demons, nous nous sommes vraiment détachés de la marque de fabrique du groupe. Aussi, nous n’avons pas prêté attention à ce que les fans attendaient de nous. À l’inverse, nous avons fait comme si les membres du groupe venaient juste de se rencontrer. Ce qui n’est, bien évidemment, pas le cas. Donc, je peux te certifier que DevilDriver sortira d’excellents albums à l’avenir.

En fait, certaines formations passent leur vie à proposer encore et encore la même soupe, comme c’est le cas pour les groupes de Thrash. Ils doivent répondre à un certain cahier des charges, sinon, c’est mort, les fans passent directement à autre chose. Nous, c’est différent. DevilDriver décide de prendre des risques, de surprendre… C’est aussi pour cette raison que tous les albums de DevilDriver sont différents les uns des autres. On ne pourra jamais dire que Pray For Villains ressemble à Beast, que Winter Kills ressemble à Trust No One, ainsi de suite… Après, il est clair que nous avons notre son, notre identité. DevilDriver se doit d’aller de l’avant, c’est vraiment notre mot d’ordre aujourd’hui ! 

Sur ce nouvel album, on compte en effet quelques surprises, notamment des parties de chant clair sur « Wishing »…

Je pense que les gens ne se souviennent plus trop que j’assurais majoritairement des chants clairs au sein de Coal Chamber. En fait, je ne viens pas du milieu Metal à proprement parler, mais du milieu Post-Punk celui des années 80. En fait, ces derniers mois, je suis un peu revenu à tout ça quand nous travaillions sur le morceau « Wishing ». J’avais tout simplement besoin de lui donner ce dont il avait besoin, sans pour autant faire attention à notre style, à notre marque de fabrique ! Donc, j’ai tout simplement fait une pause pour prendre du recul. Puis, au bout de quelques heures, je suis retourné au studio pour enregistrer ces pistes de chant clair, en plusieurs fois.

Après, c’est vrai, j’avais fait une déclaration en 2001/2002, disant que je n’intégrerai jamais de parties de chant claire au sein de DevilDriver, mais clairement, il faut remettre les choses dans leur contexte. À l’époque, je disais ça quand le mouvement Metalcore était en pleine effervescence, et à l’époque, je ne voulais en aucun cas que DevilDriver ressemble à ces groupes. Ici, c’est différent, j’ai toujours aimé la scène Goth, comme The Sisters Of Mercy, The Cure, Fields Of The Nephilism connus pour leur texture bien caractéristique. Et je dois dire que je me suis inspiré d’eux, de leur manière d’amener le chant pour « Wishes ». Finalement, aujourd’hui, avec « Wished », DevilDriver a sorti l’un de ses meilleurs morceaux à ce jour.

« Il me tarde vraiment de reprendre la route, d’enchaîner les dates quitte à manquer de sommeil, de voir 75 000 personnes « headbanguer » toute ensembles »

Est-ce que tu peux revenir sur la chanson « You Give Me A Reason To Drink », morceau sur lequel figure ton propre fils ? 

Cette chanson est toute simple… Il n’y a pas grand-chose à comprendre ! Je veux dire, tu as passé une sale journée, les gens autour de toi te gonflent, et la seule chose dont tu as envie, c’est d’aller au bar siroter une bière et quelques shots de whisky pour oublier ton existence misérable… Mais finalement, ce n’est pas une solution en soi, car à la fin, tu finis totalement bourré, ça te rend bien plus triste, et tu es en proie à d’autres plus émotions… Finalement, tout ça, ça te pourrit encore l’existence. C’est vraiment de ça dont il est question sur ce morceau ! 

DevilDriver évolue dans un registre très colérique. Est-ce que crier dans un micro te permet de te sentir mieux ? 

En toute honnêteté, je dois dire que je n’ai ressenti aucune colère quand j’ai travaillé sur cet album. À quel moment de l’album entends-tu de la colère ? La musique de DevilDriver peut paraître énervée pour quelqu’un qui n’écoute pas DevilDriver, mais non. Après, il y a vraiment de tout sur ce nouvel album. Par exemple, le morceau « Keep Away From Me », ça parle de sujets très personnels, comme de mon agoraphobie, mon comportement dans la vie de tous les jours… « Nest of Vipers , lui, ça parle de toutes ces vipères, de toutes ces personnes qui font croire qu’elles sont tes amis pour profiter de toi…

En fait, comme je t’ai dit, sur Dealing With Demons, j’ai décidé d’y peindre une partie de la société pour y engager une sorte de dialogue social. Aussi, il contient également ce morceau « Iona » qui parle de l’intérêt que les gens ont pour le « gore ». Par exemple, en période d’Halloween, les gens adorent se faire peur en regardant des films d’horreur dans lesquels des types masqués passent leur temps à décapiter des innocents. Finalement, c’est devenu tellement cliché ! C’est ça qu’est devenu Halloween aujourd’hui ? C’est ça qui plaît aux gens aujourd’hui ? Regarder des gens se faire décapiter les uns après autres. Franchement, si ton colocataire passe son temps à regarder Massacre À La Tronçonneuse, tu ferais mieux de te poser des questions sur ton état de santé. Pour moi, Halloween, ce n’est pas une histoire de massacre, mais de frisson. Où est Dracula ? Où est le frisson ? D’ailleurs, est-ce normal de regarder ce genre de films, alors que ces faits sont totalement dérangeants ? Je ne pense pas. 

Comment allez-vous faire pour promouvoir Dealing With Demons Volume. 1, maintenant qu’il est sorti ? Je vous connais pour tourner sans cesse ! Qu’allez-vous faire désormais ? 

Oui, 2020 est une année très particulière… En fait, comme je te disais en début d’interview, si nous avons décidé de sortir ce double album en deux temps, c’était tout simplement pour tourner trois ans de suite, sans interruption. Et en 25 ans de carrière, jamais il ne m’était arrivé de prendre un seul congé, un seule pause… Avec les deux volumes de Dealing With Demons, je projetais de faire le tour du monde à deux reprises… Mais bon, c’est grillé pour le moment. Demain, ça fera un an que je suis chez moi, et clairement, il me tarde vraiment de reprendre la route, d’enchaîner les dates quitte à manquer de sommeil, de voir 75 000 personnes « headbanguer » toutes ensembles…

Maintenant, que comptes-tu faire ? Vas-tu te focaliser sur la deuxième partie de Dealing With Demons, ou bien te concentrer sur le deuxième volume de la série d’albums de reprises « Country » ?

Maintenant, je vais me consacrer à la deuxième partie de Dealing With Demons. Pour ce qui de l’album de reprises, Outlaws ’Til the End, Vol. 1., c’était un sacré pari, car beaucoup de gens autour de moi m’avaient dit que c’était une mauvaise idée, mais j’ai décidé d’aller contre leur avis et de foncer ! D’ailleurs, peu en sont conscients, mais beaucoup des textes issus du milieu de la « Country » sont bien plus violents et bien plus évocateurs que certaines paroles « Black Metal ». En tout cas, j’ai pris beaucoup de plaisir à le mettre en boite, surtout que j’ai été accompagné par tout un tas de potes comme Randy Blythe de Lamb Of God, et même le fils de Johnny Cash.

Peu le savent, mais j’ai mis plus de temps à concevoir cet album de reprises que n’importe quel autre album de DevilDriver. Et pour le moment, je ne saurais te dire quand le deuxième volume sortira… Il faut déjà que je pense aux guests, et ça, ça prend déjà énormément de temps ! Mais cet album prouve une chose, que la musique Country et le Metal sont compatibles. Au départ, les autres groupes étaient sceptiques à l’idée de reprendre des classiques de la Country, et pourtant, depuis que nous l’avons fait, d’autres groupes s’y sont mis. Par exemple, Korn a proposé une reprise du morceau « The Devil Went Down to Georgia » de The Charlie Daniels Band, alors que c’était soi-disant une mauvaise idée au départ… En tout cas, c’est vraiment génial. J’aimerais que d’autres groupes du genre se lancent dans cette aventure ! 


DevilDriver, c’est : 

Dez Fafara : Chant

Mike Spreitzer : Guitare

Austin D’Amond : Batterie 

Neal Tiemann : Guitare 

Diego « Ashes » Ibarra : Basse 

Discographie : 

DevilDriver (2003)

The Fury of Our Maker’s Hand (2005)

The Last Kind Words (2007)

Pray For Villains (2009)

Beast (2011)

Winter Kills (2013)

Trust No One (2016)

Outlaws ’Til the End, Vol. 1 (2018)

Dealing With Demons, Volume I (2020)

A propos de l'auteur

Rédacteur en chef d'Heretik Magazine

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