Tapez ou collez votre texte, ici Déluge fait partie de ces groupes à la symbolique forte ! Mais outre l’image, sa musique est tout aussi intrigante et profonde et mélancolique, pouvant nous emmener depuis les abysses jusqu’aux rivages. Un projet musical aussi riche et abouti nous a donné envie d’interroger F.T., guitariste du groupe au sujet d’Ægo Templo, son nouvel album. … 

Propos de F.T. (guitare) recueillis par Thomas Deffrasnes


Que s’est-il passé durant ces cinq années qui séparent les deux albums ?

Nous avons déjà tourné et avons rencontré de belles personnes sur la route durant trois ans. Mais je voulais laisser du temps pour digérer le premier album, autant pour nous que pour le public. J’ai attendu d’avoir autre chose à raconter.

Comment sommes-nous passés du Déluge « Black Metal » à ce Déluge teinté de « Hardcore ». 

Je n’aime pas les étiquettes. Déluge n’a jamais été un groupe de Black Metal, même s’il s’inspire de l’énergie primitive du Black, avec une profonde sincérité. Je n’ai jamais vraiment fait partie de cette vague, ni de cette scène. Concernant ce nouvel album, je dirais qu’il est plus virulent, plus triste… Il faut dire que la mélancolie sera toujours l’essence de Déluge. Cependant, celui-ci apporte déjà plus d’espoir avec une intention plus lumineuse. 

L’envie d’innover et d’explorer différents univers justifie donc les collaborations sur cet album…

Tout-à-fait, et ce n’est pas intéressé. Je compose ce que j’ai envie de composer, et je vais au bout des choses. Avec « Opprobre » notamment, qui une chanson qui date d’il y a trois ans, sur certaines parties, le chant ne nous convenait pas. J’ai eu l’idée de remplacer ce moment par un solo Free-Jazz. Mon pote Matthieu Metzger était donc un élément intéressant à utiliser. Je lui ai fait part de la tendance et je lui ai dit en gros de faire ce qu’il voulait. Au bout d’une prise, il m’a totalement bluffé ! 

Toi-même, tu n’as pas d’expérience de saxophone par ailleurs ? 

Je n’ai aucune expérience de saxophoniste, bien que je sois très amateur de Jazz, sans doute plus que de Metal ! 

Qu’est-ce que nous raconte ce nouvel opus ? 

L’essence du projet, c’est la mélancolie, avec comme fil conducteur, l’eau. Il est délicat de parler d’Ægo Templo sans évoquer Æther, qui a été la matière primaire et l’énergie primitive. Là où le premier était un constat, le second construit une approche philosophique de la construction de soi. Ægo Templo veut dire « Je suis le temps », mais on peut aussi parler du temple de l’ego. Ce qui rappelle l’égoïsme et l’égocentrisme. Il faut être égoïste, car il faut penser à soi et être heureux pour partager son bonheur avec les autres. Cependant, il ne faut pas être égocentrique et ne penser qu’à soi. Dans cette société individualiste, on a tendance à reporter la faute sur l’autre et à se sacraliser trop facilement…

D’où cette réflexion philosophique émane-t-elle ? 

La thématique, c’est moi qui l’ai trouvée. Mais l’avantage d’être en tournée, c’est qu’on prend pas mal le temps de discuter dans le camion. Et cette réflexion résulte donc de débats et de constats que nous faisons. Avec Maxime, notre chanteur, nous sommes comme des frères jumeaux, qui sans se voir, sans se parler, arrivent à concevoir l’Univers de la même façon. C’est d’ailleurs pour ça qu’il a écrit quasiment l’intégralité des textes. C’est une symbiose ! 

« Déluge n’a jamais été un groupe de Black Metal, même s’il s’inspire de l’énergie primitive du Black, avec une profonde sincérité.« 

Quels ont été tes influences ? 

Deafheaven par son énergie m’a beaucoup inspiré, même s’ils se sont perdus au cours du temps… Je trouve l’approche d’Alcest très intéressante également. Et au sein du groupe, on est aussi très attentifs aux autres styles de musique, comme le Post-Punk, la Cold-Wave, la Hip-Hop, le Jazz … On essaye de nourrir ses influences de manière la plus large possible. Pour autant, on veut proposer quelque chose qui ne se fait pas !

En quel lieu Déluge prendrait tout son sens s’il y jouer ? 

J’aimerais beaucoup jouer le dos à l’Océan. J’ai un rapport très personnel à l’eau. Des traumatismes autant que des joies : l’eau à toujours était un élément central dans ma vie. J’ai besoin d’éprouver l’Océan. J’ai aussi un très bon souvenir du In Theatrum Denonium. Ces lieux nobles nous attirent ; tels que les cathédrales, les temples… Les lieux avec une âme apportent au groupe une dimension nouvelle. 

Comment vivez-vous ce passage des Acteurs de l’Ombre à MetalBlade. C’est une sacrée étape de franchie pour vous ! 

Un changement tout en souplesse, mais au regard des propositions, nous avons trouvé ce que nous cherchions chez MetalBlade. C’est un bon label, avec un réseau stratégique, important, notamment pour la promo. Ce sont des ressources top pour développer un projet. Et je ne m’attendais pas à une communication si fluide avec un si gros label. 

Déluge, c’est aussi un code couleur : le bleu, le doré. Comment expliques-tu cela ?  

C’est une identité forte développée par Valnoir. C’est quelqu’un de talentueux, une sorte d’extraterrestre qui ne sait pas dessiner, mais il parvient a créer une lecture graphique avec son art. Son œuvre en emprunte de modernité ! Il a notamment sorti un livre Analogue Black Terror qui regroupe plein d’artwoks… Dès le début, j’ai voulu l’impliquer, car je ne viens pas du milieu Black Metal, et que je n’ai pas vocation directement à en faire, mais que j’utilise cette énergie. Je lui donne la dynamique initiale ; lui, il développe l’idée….

Comment expliquer alors que ton groupe séduit le public Black Metal ? 

Je pense que Déluge apporte modestement du frais, du neuf. On a pensé qu’on allait se faire rentrer dedans lorsqu’on a été programmé dans des festivals de Black. Finalement, on a été étonné de voir que des personnes qui aiment cette scène ont été sensibles à notre musique. Au stand de merch’, on avait souvent des soldats Black Metal qui venaient nous faire part de leur agréable surprise en nous découvrant. C’est l’énergie qui prime et celle-ci se retrouve aussi dans le Black Metal ! 

L’eau étant l’élément principal de Déluge, à force d’écumer les mers, on ne rencontrerait pas le continent… 

J’ai déjà la réponse, et celle-ci se justifie par le delta entre les deux albums. Le jour où je n’aurai plus rien a raconter à travers Déluge, alors le groupe n’aura plus lieu d’être. 


Deluge, c’est :

Frederic Franczak : Basse

Benjamin Marchal : Batterie

Richard de Mello : Guitare

François-Thibaut Hordé : Guitare

Maxime Febvet : Chant

Discographie :

Æther (2015)

Ægo Templo (2020)

A propos de l'auteur

Rédacteur en chef d'Heretik Magazine

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