« Les concerts assis, ça ne tient pas debout ». On comprend. Difficile de se dire que l’on devra se contenter d’une place « assise » pour nos prochains concerts. Surtout quand c’est du Rock. Le Rock, ça se vit debout, une bière à la main, voire plus si affinité. Un point, c’est tout. Mais pourtant, on ne va pas se mentir. Il a été difficile de ne pas succomber au chant des sirènes quand le Grand Mix a annoncé la venue de Slift et Monsieur Thibault le dimanche 13 juin dernier. Et il a fallu se lever tôt pour espérer obtenir le fameux sésame, surtout que la nouvelle s’est répandue comme une traînée de poudre : « on va enfin ‘’presque’’ vivre comme avant ». La date affiche vite « complet », et le Grand Mix doit s’adapter. 

Par Axl Meu 


Pour ce faire, elle a aménagé son espace de sorte à accueillir le public dans les meilleures conditions possibles (des chaises sont disposées dans la salle principale, et l’étage est uniquement réservé à la restauration rapide). Seul inconvénient, il est impossible de manger/boire et de regarder le concert en même temps. C’est soit l’un ou l’autre. Mais bon, on ne va pas chipoter. On a notre ticket, l’autorisation de prendre quelques photos, et de profiter, tout simplement. Et autant dire que ça fait un bien fou.

Monsieur Thibault ouvre le bal dans la joie et la bonne humeur. Encore assez discrète dans les colonnes d’Heretik Magazine (même si la rédaction lui a soumis un petit interrogatoire avant le concert pour faire plus ample connaissance, tout simplement), la formation est loin d’être méconnue du public lillois, elle qui est essentiellement composée de musiciens de la scène lilloise ayant à leur actif plusieurs projets (on pensera à Manic Maya pour Myriam Bovis, à Big Bernie pour Paul Muszynski…). 

Aujourd’hui, Monsieur Thibault peut se targuer d’avoir mis au point sa propre esthétique, une sorte de Rock Progressif assez burlesque au carrefour de plusieurs styles (Math Rock, Pop, Afrobeat…) sur son premier méfait, Go Gauthier !. Et autant dire que les mélanges des genres a plutôt bien pris ce soir au Grand Mix. En effet, la formation, que l’on a imaginé impressionnée et qui s’est avérée émue (n’est-ce pas Myriam ?), a livré la prestation la plus symbolique de sa carrière tout en restant elle-même, tout simplement.  Tous les membres sont aussi « funs » les uns que les autres, et communiquent leur joie de vivre à coups de morceaux abracadabrantesques, à peine intelligibles pour le commun des mortels. Voyez-y là un gros bordel de mesures alambiquées, des basses qui communiquent entre elles, des vocalises en tous genres… Et pourtant, ça marche. Ça tue, même. Il est donc normal que Monsieur Thibault reparte avec les éloges à l’issue de son set. 

Slift fait clairement partie de ces formations qui n’ont pas eu de bol en 2020. Vous savez, celles qui ont publié leur dernier album courant février/mars 2020, sans savoir que l’humanité tout entière serait mise sous cloche quelques semaines plus tard. Bref, c’est le sort qui a été réservé à Ummon, son deuxième album, paru le 28 février 2020, à une époque qui semble tellement lointaine aujourd’hui. Vous l’aurez compris, les Toulousains n’ont pas pu défendre leur album et comptent bien se rattraper les mois qui viennent. 

C’est donc un poil revanchard que l’on imagine Slift ce soir. Mais non, le trio a surtout joué la carte du naturel et a promis d’embarquer son public à bord d’une navette spatiale dont lui seul a les commandes. Pour ça, rien de tel que des morceaux puissants qui lorgnent entre le Space Rock, le Blues, le Krautrock, le Garage Rock et le Rock psychédélique, le tout exacerbé par de la réverbération, et du fuzz, encore du fuzz (rien que ça). Et surtout de la vie et un peu d’improvisation. Comprenez donc que Slift n’a aucun cas manqué de vivacité (et de talent) ce soir, notamment pendant l’exécution de « Thousand Helmets of Gold » et même pendant « Ummon » (qui, hélas, aura souffert d’une extinction de basse, mais rien de grave). 

Car oui, la formation a beau n’être composée que de trois membres, toutes ses compositions ont été interprétées sans que le moindre détail n’ait été écarté. Il n’en fallait pas moins pour nouer un lien fort entre le groupe et le public qui, peut-être assis, aura pris le temps d’encenser le trio à la toute fin du concert lors d’une standing-ovation bien méritée. Il faut dire que, en plus de nous avoir fait voyager (loin, loin, loin…), Slift est parvenu à nous faire oublier le temps d’une courte soirée le marasme ambiant engendré par la crise sanitaire.  

Il est vrai que les concerts « assis » ne tiendront pas debout bien longtemps, mais les retours ont toutefois été unanimes : le temps d’une petite soirée, nous avons vécu comme avant, certes, tout en respectant les consignes drastiques imposées par le gouvernement, mais « comme avant » quand même. Ça se prend, et nous reviendrions sans hésiter si c’était à refaire. 

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Rédacteur en chef d'Heretik Magazine

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