Le scénario sort de l’ordinaire, il est vrai. En septembre dernier, à quelques mois de la parution d’Aggression Continuum, le nouvel et onzième album de Fear Factory, son chanteur, Burton C. Bell, décide de quitter le navire une fois pour toutes pour raisons personnelles. C’est dommage, mis à part cette grosse déconvenue, l’album reste d’excellente facture. Nous avons fait le tour de la question en compagnie de Dino Cazares, son guitariste.
Propos de Dino Cazares (guitare) recueillis par Axl Meu
Salut Dino, comment te portes-tu malgré la conjoncture actuelle ? Penses-tu que nous allons enfin voir le bout du tunnel très prochainement ?
Oui, enfin, j’espère, un peu comme tout le monde ! J’espère que l’on pourra repartir en tournée l’année prochaine.
Fear Factory est de retour avec un nouvel album, c’est Aggression Continuum. Néanmoins, sa sortie succède au départ-surprise de votre chanteur, Burton C. Bell. J’imagine qu’il est assez difficile de défendre cet album compte-tenu des circonstances…
Oui, c’est une situation assez inédite, mais il faut apprendre à composer avec ces événements et aller de l’avant. C’est comme ça.
Peux-tu me présenter Aggression Continuum ? Il me semble que vous avez pris beaucoup de temps à travailler dessus.
Que dire, si ce n’est que c’est un ‘’putain’’ d’album ? Il est en quelques sortes la synthèse de toutes les marques de fabrique de Fear Factory : la double-pédale, des refrains entêtants, ce fameux contraste entre les parties purement chantées et les autres, plus lourdes, des claviers très expressifs, notamment sur « Recode ». Sincèrement, j’adore cet album ! J’ai hâte que les fans se l’approprient.
Il me semble que vous en avez enregistré plusieurs versions et que la première remonte à 2017. Est-ce que tu peux me donner plus d’informations à ce sujet ?
Oui, voilà, nous avons enregistré une première « version » de l’album, mais suite aux problèmes juridiques que nous avons rencontrés en 2017 (sur la propriété du nom du groupe, NDLR), le processus de création a tellement pris de retard que j’ai décidé de rebrousser chemin et de le réenregistrer, de le refaire de A à Z. À la place de me contenter d’une batterie programmée, nous en avons enregistré de vraies parties et ajouté des claviers qui ne figuraient pas sur la version d’origine.
En plus des sessions, le groupe a mis en place une campagne de financement participatif pour le financer.
En fait, le plus dur, ça a été d’attendre qu’il sorte et de nous dépêtrer des affaires dans lesquelles nous nous trouvions. Et pour tout te dire, au départ, je ne savais pas si l’album allait voir le jour sous le blase de Fear Factory. C’était assez difficile en ce sens, mais je n’ai pas eu de quelconques problèmes pour l’enregistrer. Je veux dire, ce n’était pas difficile pour moi d’ajouter de nouveaux éléments à l’album.
Comment as-tu collaboré avec Burton pour l’enregistrement de l’album ? Il a décidé de quitter le groupe si furtivement, mais j’imagine que vous avez travaillé ensemble sur cet album…
Oui, nous étions ensemble lors des premières sessions d’enregistrement, et c’était tout.
Concernant l’ambiance « générale », aurais-tu imaginé une seule seconde qu’il claquerait la porte aussi furtivement ?
Non, vraiment, je ne saurais te dire à quoi il pensait réellement à l’époque. Nous avons, certes, travaillé sur l’album ensemble, mais je ne sais pas ce qui se passait dans sa tête à cette époque. Le mieux serait de lui demander.
De quoi traite Aggression Continuum ? Que devons-nous comprendre derrière le nom de l’album ?
Le titre de l’album fait juste allusion aux différents degrés de violence auxquels nous nous heurtons au quotidien. Je veux dire, malgré tout ce qui se passe, Burton a beau être parti du groupe, je continuerai à porter ce projet quoi qu’il arrive. Concernant les thématiques abordées, elles sont très futuristes et en lien avec la Science-Fiction. Le concept général de l’album évoque une femme pour qui la conscience se fait extraire, puis transférer dans une sorte d’automate. Tout l’album est centré autour de cette thématique et des problèmes rencontrées par cet individu qui essaiera tant bien que mal à faire comprendre que derrière sa forme « automate » se cache un individu sensible. C’est un peu l’histoire que raconte « Purity ».

« Au départ, je ne savais pas si l’album allait voir le jour sous le blase de Fear Factory »
Sur cet album, on reconnaît bien évidemment la patte de Fear Factory. Ce Metal Industriel cyclique très abrasif. Est-ce difficile pour toi de perfectionner une formule que tu as mise au point il y a trente ans ? Tu as ton propre style, mais, à quoi penses-tu quand tu prends ta guitare ?
Quand je prends ma guitare ? Je veux tout simplement écrire un bon morceau. C’est vrai, Fear Factory a créé son propre style de Metal, mais nous ne voulons pas nous reposer sur nos acquis, continuer à écrire de bonnes chansons et apporter de nouveaux éléments à notre musique en fonction de nos nouvelles écoutes, en fonction de nos découvertes. Après, l’idée n’est pas de changer notre formule, mais plutôt de créer de meilleurs morceaux, de meilleurs points d’accroche. Mais oui, nous avons notre son.
Le groupe fête actuellement son 30e anniversaire. Pensez-vous pour célébrer la carrière du groupe ?
Eh bien, je pense qu’il sera trop tard pour faire quoi que ce soit l’année prochaine… En ce qui me concerne, la sortie de ce nouvel album coïncide bien avec l’anniversaire du groupe. Donc, disons que ça fera l’affaire.
J’imagine qu’il y aura bel et bien une tournée pour promouvoir l’album et le défendre sur scène. Nous ne savons pas encore qui tiendra le micro, cependant.
Non, je n’ai pas encore pris de décision à ce sujet. Je ne sais pas qui chantera sur ces morceaux sur scène. C’est la faute de la pandémie… Je n’ai pas pu inviter qui que soit…
Aurais-tu néanmoins quelques pistes ?
Oui, bien sûr.
Est-ce que tu souhaites que ce nouveau chanteur ait la même identité sonore que Burton, ou bien es-tu ouvert à tout type de profils ?
Je reste ouvert à tout type de profil. Peut-être que la nouvelle recrue saura apporter de nouveaux éléments à la musique de Fear Factory. Cependant, il devra tout de même respecter l’héritage et le passé du groupe. En gros, tout ce que nous avons créé jusqu’ici. Il devra incarner les vieux albums du groupe, tout en insufflant une nouvelle ère au groupe.
Tu penses qu’il sera difficile pour lui de respecter LA voix de Burton ?
En fait, la voix de Burton a évolué au fil des années, même entre Soul of a New Machine et Demanufacture. Le chanteur qui devra interpréter ces morceaux devra le faire de la meilleure des façons possibles. On ne compte pas s’adapter. Les chansons devront être interprétées comme elles l’ont toujours été. Après, je suis conscient que personne ne pourra se rapprocher du coffre de Burton, je n’attends pas de cette fameuse personne qu’elle soit sa copie conforme, mais sa voix devra tout de même être conforme au style dans lequel nous évoluons.
Tout à l’heure, tu me disais que vous aviez une nouvelle fois travaillé avec Andy Sneap pour le mix’. Quelques commentaires sur sa manière de travailler ?
Ce que j’adore chez lui, c’est sa capacité à s’adapter en fonction du groupe avec lequel il travaille. Il collabore avec beaucoup de monde et parvient toujours à faire la différence. Il ne laisse rien passer. Tu vois, avec lui, nous pouvons avoir ce genre de longues discussions sur comment doit sonner la caisse claire, et ainsi de suite. Il est une véritable source de conseils et m’a appris tout un tas de choses que je ne savais pas sur comment doit sonner un album. On avait déjà bossé ensemble sur Genexus, ça avait déjà bien ‘’matché’’ entre nous. Je ne vois pas pourquoi je serais allé voir ailleurs.
Quand on parle de Fear Factory, il y a toujours un album qui revient dans nos discussions. C’est Demanufacture. À force d’en parler, en es-tu toujours aussi fier ? Peut-être que tu préférerais que les autres soient également mis en avant…
Je pense que tous les fans ont leur préféré, leurs préférences. Après, je vois ce que tu veux dire. Les fans continuent de parler de Demanufacture, et comme tous les albums auxquels j’ai participé, je suis particulièrement fier. Je ne déteste aucun des albums que j’ai composés. Au contraire.
Fear Factory, c’est :
Dino Cazares : Guitare
Mike Heller : Batterie
Tony Campos : Basse, Vocals (backing)
Discographie :
Soul of a New Machine (1992)
Demanufacture (1995)
Obsolete (1998)
Digimortal (2001)
Concrete (2002)
Archetype (2004)
Transgression (2005)
Mechanize (2010)
The Industrialist (2012)
Genexus (2015)
Aggression Continuum (2021)
Laisser un commentaire