La race humaine poursuit sa route, sur le bon chemin, mais dans la mauvaise direction ! C’est le propos d’Absent In Body, super-band rassemblant des membres d’Amenra, Neurosis et Cavalera Conspiracy. Plague God (attendu ce vendredi chez Relapse Records) dépeint à sa manière l’actualité : la guerre, la pandémie, la crise écologique… Colin H. Van Eeckhout et Mathieu J. Vandekerckhove ont contenté notre curiosité

Propos de Colin H. Van Eeckhout (chant) et Mathieu J. Vandekerckhove (guitare) recueillis par par Thomas Deffrasnes. 


Ce projet est véritablement un laboratoire pour vous ! C’est un groupe dans lequel vous expérimentez ! 

Colin H. Van Eeckhout (chant) : Oui, c’est l’idée ! Nous n’aurions pas pu composer Plague God avec nos autres groupes. Il y a ici cette volonté de fermer les yeux sur ce qu’on a pu construire avec nos autres projets et de présenter quelque chose de nouveau ici. Les émotions recherchées et éprouvées dans ce projet sont très différentes à celles qu’on peut retrouver dans Amenra. Avec ce projet, on se plaît à explorer de nouveaux territoires musicaux, à écrire une nouvelle histoire.

C’est d’ailleurs intéressant que tu évoques la notion d’Histoire. « Plague God » est un titre que n’est pas sans rappeler nos deux dernières années… 

Colin : Ce titre est lié à la COVID-19 ! Il faut savoir que l’album était en partie écrit avant le début de la pandémie, en 2017, pour être exact. Mais c’est vraiment le début de la crise sanitaire qui a permis à cette musique de prendre forme. Le son possède cette dimension oppressante, cette rage bouillonnante, difficilement lisible… C’est une musique chargée en informations et forte d’une dimension mécanique. C’est un peu comme si tu étais coincé dans une machine infernale ! La crise sanitaire, son rapport organique à l’humain, ce mélange entre la lenteur et la fougue, sans oublier les guerres et les dérives climatiques nous sont apparus comme des évidences. Il nous fallait traiter ces sujets. 

Cette omniprésence de la menace est d’autant plus au cœur de l’actualité aujourd’hui. 

Colin : Bien entendu, avec l’invasion de l’Ukraine… Mais on pourrait aussi parler de la Palestine et d’Israël, de la Syrie… Certes, cela existe depuis la nuit des temps, mais il ne faut pas oublier que ces conflits ne cessent aussi d’évoluer depuis la nuit des temps. 

Mathieu : Les informations et les médias nous présentent constamment le bilan dramatique du monde dans lequel on évolue et témoignent de l’impuissance des êtres-humains face au déclin. Ce constat ne fait que justifier cet album pour finir. 

Cette approche métaphorique de la musique se ressent aussi à travers les clips. 

Mathieu : J’ai réalisé les vidéos pour les deux premiers singles. Et comme tu le dis, je voulais aussi faire correspondre les images et notre musique. Ce sont des visuels forts, lourds et intenses qui soulignent notre propos.

« Les émotions recherchées et éprouvées dans ce projet sont très différentes à celles qu’on peut retrouver dans Amenra. Avec ce projet, on se plaît à explorer de nouveaux territoires musicaux, à écrire une nouvelle histoire… »

Pour ce projet, vous avez convié Igor Cavalera. Comment cette collaboration a-t-elle vu le jour ? 

Colin : Tout est allé très vite depuis la formation du groupe en 2017 par Mattew et Scott. Nous avons sorti un EP, puis avons enchaîné avec l’écriture d’un opus. Dans le courant de l’année, les guitares étaient déjà enregistrées. Mais, une question nous a chagrinés… Doit-on passer par des batteries analogiques ou non pour l’intro ? L’idée étant de nuancer le côté électronique des batteries programmées par Mattew. C’est là qu’Igor entre en scène (rires téléphoniques). Il était dans les parages du côté de Gand, du fait que sa femme bosse pour un label ici-même… Et on lui a proposé d’essayer quelque chose sur des instruments typiques et d’y apporter du relief mais aussi des nuances tribales et primitives. En réalité, c’était une idée géniale, car ça a ajouté une nouvelle lecture à l’album : la défiance de l’époque contemporaine, le retour a un mode de vie plus humble et attentif des besoins du monde, environnementaux… C’est la rencontre de l’ancien et du nouveau monde. 

Cette rencontre de l’ancien et du moderne se justifie aussi par la créature présente sur l’artwork. 

Colin : Nous sommes partis de cette base : un crâne humain agrémenté de nouveaux organes faciaux, de sorte à imaginer une nouvelle race. Comme l’idée de marier l’ancien et le moderne est une clef de cet album, nous avons souhaité nous figurer ce que pourrait être la suite de l’évolution humaine, comme ajouter une nouvelle figure à la chaîne de Darwin. 

J’avais discuté avec toi Colin au sujet du dernier album d’Amenra, et tu m’avais avoué ne plus vouloir proposer une musique sujette à l’introspection et que tu préférais plutôt t’adresser aux gens directement. Ici, les problématiques soulevées s’adressent à tout un chacun… Tu es donc dans cette même dynamique ? 

Colin : La pierre initiale est la musique… C’est elle qui donne le ton, mais aussi l’adresse : à qui dois-je parler ? Cette histoire, ce concept sont le fruit de discussion, des lectures, de constats partagés… Ainsi, l’angle de création est très différent de ce qu’on peut faire avec Amenra. La volonté est qu’il y ait un dénominateur commun qui rassemble tout le monde, y compris nous. L’histoire qu’on te raconte est celle du monde en soi. Alors tu as raison, l’album est destiné à tous. 

Le groupe se trouve aussi dans une dynamique nouvelle. Vous étiez chez Impertension Records… Désormais, vous faites partie de l’écurie de Relapse Records. Est-ce la traduction de nouvelles ambitions pour le groupe ? Allez-vous enfin vous produire sur scène ?

Mathieu : Oui, on souhaite gagner en auditeurs et parfaire la diffusion de notre musique. On a rencontré les gars de Relapse Records à Philadelphie il y a quelques années… Et ils ont été très réceptifs au projet !

Il est vrai qu’on aimerait proposer une expérience scénique pour Absent In Body, mais c’est délicat. Igor Cavalera est à Londres en ce moment et on a tous nos projets… Et quand on sera libres, l’album ne sera plus à défendre puisqu’il sera déjà paru depuis un moment. Mais qui sait ? Ça ne coûte rien d’espérer ! 


Absent In Body, c’est :

Colin H. Van Eeckhout : Chant, basse

Mathieu J. Vandekerckhove : Guitare

Scott Kelly : Chant, guitare

Igor Cavalera : Batterie

Discographie :

The Abyss Stares Back – Vol. V (EP-2017)

Plague God (2022)

A propos de l'auteur

Rédacteur en chef d'Heretik Magazine

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