LIVE-REPORT - Enfrance du Rock (Orchies)
- Axl Meu
- il y a 2 jours
- 8 min de lecture
Rendez-vous à Orchies, au Pacbo (Pôle d’Animation Culturelle d’Orchies) plus précisément pour la septième édition de l’Enfrance du Rock. Ce festival, né en 2017 de l’imagination de musiciens désireux de promouvoir le Rock francophone, a accueilli auparavant Elmer Food Beat, Aston Villa et les Fatals Picards. Cette année, les organisateurs ont opté pour une programmation très Metal et Punk… Alors, bien évidemment, Heretik Magazine était présent.
Par Flavien Minne / Photos : Moris DC (retrouvez plus de photos sur nos réseaux sociaux !)
VENDREDI 3 OCTOBRE :
L'accès est facile, le parcage des véhicules aussi. Après avoir passé le poste de sécurité, nous entrons dans une cour clôturée entourée de foodtrucks. Et il y en a vraiment pour tous les goûts, ainsi qu’un bar extérieur. Pénétrons à l’intérieur du vaisseau, juste à l’entrée se trouve un premier stand : celui du papa de Noah, le Ch’ti Warrior, polyhandicapé à la suite de complications à la naissance. Si ce petit bonhomme de 10 ans est un grand guerrier, ses parents ne le sont pas moins, alors l’orga a mis un urne pour recueillir les gobelets consignés. Ainsi L’Enfrance du Rock a reversé à cette famille 510€. Voici une très belle initiative qui a le mérite d’être signalée.
Continuons la visite : face à nous se trouve un long couloir dédié aux merchandising, à commencer par celui du fest… Avec une innovation : les T-shirts sont floqués à la demande sous nos yeux par Projet Support Retouch de Pommereuil. Ainsi il n’y a pas de pertes ni d’achat de matières premières inutile. A notre gauche, un agréable patio, accueillant le bar un espace V.I.P. héberge également le duo Rock’n Granges mixant leur set pendant les intermèdes.
Après avoir rencontré deux des organisateurs, Nico et Max du groupe Lazy, nous pénétrons dans cette très belle salle pour attendre la prestation de Qamelto. Un nom bizarre nous direz-vous ! Ne confondez pas avec le Camel Toe (je vous laisse chercher la signification), Qamelto est un adjectif zoulou équivalent à “cool”. Après un premier EP en 2020, le quatuor auvergnat sort son premier album Scotoma l’année dernière sous le label M & O Music. Et c’est L’Hôte et Légion, les deux premiers titres de cet opus qui commencent le set.

“Bonsoir L’Enfrance du Rock ! Ce soir Qamelto est là, et vous ? Vous êtes là ?” Qamelto enchaîne avec "Juste Fais le", morceau alternatif aux notes Nu-Metal et rehaussé du duo de voix entre Raphaël et Thomas le guitariste à la crête. C’est avec un grand plaisir que le frontman monte sur l’egorizer : “Il y a un peu de monde ce soir, nous sommes Qamelto, nous venons de Clermont-Ferrand. On a un morceau bien particulier : ce soir c’est moi qui ait la plus grosse et je vais vous le prouver.” La plus grosse est un titre très fun, dynamique et tristement réaliste. Raphaël James parle énormément et a beaucoup d’humour. Mais pour l’heure “La prochaine chanson parle de combat, le combat contre la maladie.” Cogne ne plombe pas l’atmosphère, bien au contraire. Ce morceau plus solennel est animé par de bons riffs, offrant un solo de guitare prenant aux tripes sous les lights rouges. Le chanteur s’esquive pour se changer, revient torse nu, arborant un pantalon floqué du drapeau du Brésil. Le combat se matérialise par des passes de Capoeira, pour laisser place à une partie de batterie pour le plus grand plaisir du public. “Les amis, c’est ce putain de temps qui passe. Merci à vous de cette présence.” Tic Tac, voici "Chronophobie". le frontman se montre showman dansant devant la batterie, avant de conclure par "Ferme Ta Gueule". Raphaël finit par être l’arbitre d’un petit concours de sonomètre, allant dans le public pour prendre les mesures. Qamelto nous a offert un super final très Rock pour un super Metal. “On laisse la place à Cachemire.”
Le désormais quintet est actuellement très en vogue après avoir ouvert la Mainstage du Hellfest cette année. De plus, on est à une semaine de la sortie de leur quatrième album Suffit juste d’une seconde. Cachemire est aussi provocateur. Les Nantais arrivent tout de blanc vêtus, les hommes en jupe et la nouvelle venue, la blonde guitariste Alice Animal est en short sous un triangle lumineux, pointe en bas. L’introduction se fait par une petite musique de chambre au clavecin. “Mesdames et Messieurs, une ovation pour le groupe Cachemire !” Et ça commence tout de suite par le gros sons des guitares de "Moi Etre Roi". Freddy, le chanteur-guitariste se déhanche entre deux “Oh Yeah”. Puis suivent "Je et Rouge" dont le refrain est repris par le public alors qu’un pogo se met en place. “Comment ça va ce soir ? La dernière fois qu’on est venus ici, le lendemain, c’était le confinement, alors on va se venger, on va se chauffer les cordes vocales.“ Pendant "Les Petits Poings", on assiste à un gentil Wall Of Death d’un public en pleine éclat’ qui fait un clapping pendant le refrain. “est-ce-que tu veux rendre hommage ce soir?” Même si l’auditoire bouge encore beaucoup, c’est avec émotion qu’il reçoit cette très belle reprise de "La Nuit, Je Mens" d’Alain Bashung. Puis, frénétiquement, Cachemire enchaîne avec "Pied Au Plancher", sous le triangle bleui, avec la batterie de Farid mise en avant. “Je veux claquer du cash” introduit Moucash avec son rythme rapide et son chant incessant . Le public saute partout, Orchies est une fête. “Je ne sais pas si vous le savez, mais on sort notre nouvel album dans quelques jours… Je m’appelle Eva…” Adam est lancé. Ce morceau sur l’inclusion est très électrique, très puissant, poignant et assez court. La foule est sensible à la nouvelle composition comme à Ma Gueule. On repart dans le dur avec "Cantona" et "l’Animal" pendant lequel les gratteux bougent énormément. “je veux voir du Mascara couler” pendant "Chanson Pour Sépulture". “C’était Cachemire pour vous servir.” Le public exulte pendant la traditionnelle photo sur "Hey Jude".

À une semaine de leur Olympia, les Sidilarsen sont plutôt en pleine forme. L’ouvre-bouteille “De Gaulle” stylisé s’allume. Didou nous lance : “Est-ce que vous êtes prêts à vibrer ? “ Le public comprend … Comme On Vibre ouvre les hostilités. Tout le monde, sur scène et dans la salle, saute à l’unisson. “ Si la terre est plate, crois Lucifer”... Déjà un premier extrait du dernier album avec Intox. Les textes sont revendicatifs, rageurs et relayés par David et Ben Bury, à l’image de Retourner la France pendant lequel Marvyn, le batteur est mis en lumière. La foule prend une bonne dose d’énergie et se lâche littéralement. “Merci, gros respect, merci !” Puis vient un gros moment d’émotion : “Le morceau qui suit est dédié aux femmes et aux minorités oppressées” Adelphité, du nom de la solidarité entre hommes, femmes et non-binaires est lancé avec son son indus et son chant d’une folle rage. Décidément, Que la Lumière soit est à l’honneur ce soir avec On Revient Sur Terre et sa liste de gens “laids”. Suivront Sur Les Fleurs avec du gros son et une voix douce et le dynamique Back To Basics. Le show s’achève après une pause sur un véritable défouloir pendant "On Va Tous Crever" et le magnifique "Des Milliards". Sidilarsen est résolument prêt à arpenter la scène de la salle aux lettres rouges : L’Olympia, prépare toi, les Ariégeois sont là !

SAMEDI 4 OCTOBRE :
Dimanche, le second jour de L’Enfrance du Rock va se montrer bien différent de la veille avec quatre groupes aux styles bien distincts. Et on commence tout de suite avec Jimm. La salle se remplit peu à peu et le public est encore très éparpillé. Pourtant, Jimm est un guitar hero à la Française, né avec une Gibson Les paul dans les mains, qui associe son Rock à des textes engagés. Jimm et son groupe entrent en lice de façon humble, presque timide. “Bonsoir, on est très contents d’être là. Perso, ça fait très longtemps que je ne suis pas monté sur scène.” Le musicien au débardeur noir sort un nouvel album Momentum le 16 Octobre, alors il profite ce soir de tester de nous faire découvrir ses nouvelles compositions en commençant par "Le Nouvel Inquisiteur" et "Guerilla". Les autres albums ont également un représentant avec "Occident Oxydant", "Je Cherche à M’Endormir d’In(can)descence" de 2015, A L’Interieur du premier album pour finir par Big Brother. Parfois Punk-Rock, parfois mélancolique mais toujours revendicatrice, la musique de Jimm est de toute beauté, avec un chant rugueux. Jimm part comme il est venu, sans bruit. Malheureusement ! Il mériterait tellement qu’il y ait du bruit autour de lui.

On change complètement d’ambiance avec un autre héros, celui de notre enf(r)ance : le nordiste, né à Hénin-Beaumont, Bernard Minet, 71 ans, arrive avec son Metal Band. Le Pacbo se transforme en une énorme fête entre le carnaval de Dunkerque et l’Oktoberfest. Plébiscité dès son arrivée, l’ex-Musclé est complètement allumé, commençant par "Goldorak Go!", puis maître de l’autodérision, il enchaîne avec Salut Bande de Tarés des Inconnus. Sur un gros riff déboule "Bioman". “Super !” Puis "Le Collège Fou Fou Fou" et "Dragon Ball Z" font leurs apparitions. “Les amis du Club Dorothée, nous sommes en 1993”. Bernard Minet ne boude pas son plaisir, échangeant longtemps et beaucoup. Puis le BMMB enchaîne "Olive et Tom", "Juliette Je T’Aime", Denver, ainsi que Jeanne et Serge sur un petit air presque jamaïcain. Par contre Ken Le Survivant est poussé par des guitares puissantes.
Après "Les Chevaliers Du Zodiaque", Bernard Minet rend hommage à son ancien groupe avec "la Merguez Party" et là, c’est du pur délire : une farandole géante s’organise dans la salle, sortant dans le couloir central jusque dans la cour. Le concert s’achève sur "Capitaine Flam". Il est difficile d’en déduire quoi que ce soit de ce que nous venons de voir. Bien sûr, Bernard Minet Metal Band est un truc génial et décalé, bien sûr, la nostalgie prend l’ascendant sur la critique, mais on espère que ce n’est que du 257ème degré et de la gaudriole. Mais quand même, ce soir, les métalleux né dans les années ‘70 et ‘80 se sont bien éclatés en retrouvant leur âme d’enfant.

La fête continue avec le set de Rock’n Granges, surtout quand Porcherie passe dans les enceintes. Le public,parti se restaurer, danse en mâchant et buvant. Celui-ci est chauffé à blanc pour accueillir No One Is Innocent. Malheureusement, ce sera la dernière tournée des gens de Pigalle après des tumultes judiciaires qui se solderont par le départ de membres. L’Enfrance du Rock sera la seule date de Colères Tour dans les Hauts-de-France, alors c’est un public ultra-compacte qui attend Kemar et sa bande.
Les balances sont longues et un drapeau ukrainien trône fièrement sur un ampli. No One entre dans la bataille sous une intro très Electro. Malgré un nouveau line-up, le groupe paraît déjà bien rodé et on sent une cohésion. Kemar joue avec son pied de micro et de sa voix acérée, mimant une droite, une gauche puis un uppercut pendant "Ali (King Of Ring)". “Hey, hey, hey ! Quel kiff de se retrouver dans le Nord !” Le groupe enchaîne avec "A La Gloire Du Marché" et "Kids Are On The Run" de l’album Propaganda. Le chanteur saute partout comme à son habitude. “Merci à tous !”... Grand classique dans la discographie, La Peau voit le public s’exécuter aux ordres de “Jump, jump, jump !”. Petite pause pour le frontman pendant un moment instrumental. La deuxième partie de la prestation comporte les titres "Nomenclature","Forces du Désordre", "l’émotion de Charlie" et "What The Fuck" de Frankenstein... Le public a droit à un rappel avec "Revolution.Com" et "Silencio", et c’est a cappella que Kemar reprend 20 Ans. “Vous en voulez encore ? Oh yeah !” Une sirène d’alarme retentit… “Ce dernier morceau est sur la résistance chilienne”. "Chile" ferme le set et achève l’auditoire. No One Is Innocent nous a offert un génialissime ultime concert nordiste et conclut de la plus belle des façons cette septième édition de L’Enfrance du Rock.

Et qu’elle était belle, cette Enfrance du Rock, tant le site est réellement propice aux agapes. L’orga et les bénévoles sont constamment dans la bienveillance avec toujours le sourire et un trait d’humour. Le choix des artistes a fait faire à notre ascenseur émotionnel le yo-yo, passant du rire aux larmes, de la douceur de vivre à la rage. Merci à vous tous pour ces moments extraordinaires.



